Les couleurs du 1er mai

Ils se sont levés dans la fraîcheur, ils sont rentrés sous le soleil, les pédaleurs du Premier mai, aussi nombreux que colorés. Quelques vingt-quatre paires de jambes et autant de tuniques : des gilets jaunes et des gilets noirs, les uns pacifiques, les autres débonnaires … ouf, on respire, notre commissaire peut se reposer sur ses deux pédales. On voit aussi du rouge et du blanc, du vert et du grenat, un bouquet presque parfait.

Mais les couleurs, noyées de brume, sont d’abord indistinctes, on n’y voit que du blanc. Ce n’est pas le bouquet, c’est le muguet, et comme disait mon ami Alfred de Vigny : Dansez, et couronnez de fleurs vos fronts d’albâtre / Liez au blanc muguet l’hyacinthe bleuâtre …Ce que nous n’avons pas omis de faire, fallait voir ça : la danse des braquets, l’aplomb des bellâtres, l’insouciance des muguets (ces blancs-becs), l’ardeur des bleus et la complainte des vieux. Un long serpent épousant les méandres de la Moselle. Jusqu’à ce qu’enfin le soleil perce : c’est le don que nous fait Germain … n’importe quoi, il n’y avait pas de Germain ! Ce devait être son cousin. N’empêche, ça se réchauffe, ça s’illumine, la campagne apparaît, et les arbres en fleur, les verts pâturages, les vaches brunes et les lapins rouquins.

Mais le panard, c’est de former alors un petit groupe à l’arrière, la vraie fête du travail … la trêve des cadences, un jour férié digne de ce nom, et une apothéose : le retour par la piste cyclable au sortir de Pierre-la Treiche, la plus belle des pistes de la région, et la côte de Maron, un pur délice quand on s’y hisse calmement. Le tout suivi d’une voluptueuse traversée de la forêt de Haye et d’une remontée tranquille sur Champ-le-Boeuf.

Pierre m’apprend à l’instant que le premier groupe aura pris l’option inverse, par Dommartin, Villey-le-Sec, Gondreville et Velaine. Bien moins jolie, cette option, entre nous soit dit, mais ne chipotons pas, les athlètes ne sont pas des esthètes.
En résumé, un Premier mai coloré, très frais puis réchauffé, sans aucun incident, sans casse, sans scandale. Un bain d’oxygène, et non pas de lacrymogène.  

Reynald