Chroniques 2016

Petites chroniques du secrétaire (Reynald Lahanque) : année 2016

Restons groupés (3 janvier)

On a remis ça le 3 janvier 2016 :
Attendu que c’est le moment des vœux, et que les cyclistes, gros consommateurs de calories, raffolent de bananes et de plats de pâtes, j’ose le dire :

Bananée 2016 !
Happy nouilleurs !

Après le « bonne année deux mille chaises ! », j’en suis déjà à trois jeux de mots pourris : une année qui commence bien et qui promet beaucoup.

La tradition du Nouvel An a été respectée ce matin : il y avait foule (ou presque) ! Une bonne vingtaine de fêtards (avinés et alourdis) a tâté du braquet, avec plus ou moins d’allant. Du vent dans le pif, des faux plats et des vraies grimpettes pour commencer. Vélo-balai que je suis (faut bien montrer l’exemple en début d’année), je ne manque pas de boulot : les kilos de trop du kiné, les excès de table des uns, les coups de mou des autres, autant de causes de décrochage précoce et de dispersion répétée.
Mais une fois, deux fois, toujours, les Randos se regroupent. C’est admirable.
Et tous profitent de petites routes qu’on devrait emprunter plus souvent, escarpées mais bien jolies (du côté de Saffais, de Haussonville, de Onsenvoie-en-l’air et de Ilsonfous-ces-romains).

Après la pause de Méhoncourt… mais on court, vraiment ? Niet, pas de séparation en deux groupes, qu’ils disent : le programme maintenant c’est que du plat sous le pédalier et du vent dans les lombaires, y’a qu’à laisser faire, groupés on est, groupés on reste. Jusqu’à ce que groupés on ne soit plus. La faute à qui ? La faute au tempo, autant dire à personne. Ah, ce bon vieux tempo, c’est qu’il fait des siennes, le tempo ! Plus qu’il est vif et plus qu’il éparpille.
Mais une fois encore, les Randos se regroupent. C’est vraiment admirable.
Alors faisons un vœu, un vrai : en 2016, le record de solidarité ils vont battre, les Randos !

Quant à moi, trois autres records je viserai : un record de vitesse en descente, un record de lenteur en montée, un record de contemplation sur le plat.
N’est-ce pas très raisonnable ?
Il y a au moins un record que je suis sûr de battre, celui de l’âge : jamais je n’aurais roulé en étant aussi vieux. Et vous aussi, d’ailleurs. « La roue tourne », qu’ils disent, les cyclistes, tout contents. Ils ne se rendent pas compte.

Le club des cinq (31 janvier)

Janvier touche à sa fin, les forces s’épuisent, les Randos s’économisent… S’ils font du vélo, c’est en rêve, bien au chaud sous la couette. Du vélo couché, en somme, bien au sec. Les forçats de la route s’embourgeoisent, les héros sont fatigués.
Dommage, pour une fois que janvier comptait 31 jours, et que le 31 tombait un dimanche, il aurait fallu fêter dignement l’événement (une année trissextile, ça n’arrive qu’une fois par siècle, à ma connaissance, mais je peux me tromper). Le club a donc failli sombrer dans le déshonneur.
Failli, seulement, car six de ses plus éminents représentants, ont refusé, eux, cette odieuse capitulation : car ils sont six au rendez-vous, deux casaques noires, les Dark Vador Marc et Stéphane ; deux tuniques bleues, les patriotes Pierre et Jean-Michel, et deux maillots jaunes – on ne rit pas – les anciens champions, Gégé et moi-même. Hélas, l’équipe jaune se disloque après 5 km, les bronches de Gégé réclamant un air moins froid et moins humide. C’est donc à cinq que la balade s’effectue, une des plus agréables de l’année, par un temps doux et clément, sous un ciel laiteux et bienveillant. Du moins pendant la première moitié, une bruine fine et goûteuse survenant ensuite à point nommé pour rafraîchir les organismes et ajouter au plaisir d’un retour avec vent favorable.
Les Dark Vador ont la pédale laser dans les côtes, les Bleus veillent sur le maillot jaune esseulé, le quintette va bon train, le tempo est vif et la pédalée souple.
Sans énergumène à l’avant, sans tricheur à l’arrière, le club des cinq respecte le parcours, sans le massacrer ni le raccourcir. Deux touches de bleu, deux traits noirs et un peu de jaune, le tableau est parfait. Il faut donc remercier les dormeurs de n’en avoir pas brisé l’harmonie.
Et si on roulait par groupes de cinq en février ? Avec un vélo-pinceau, pour marier les couleurs. Un peu de poésie dans ce monde de brutes, ça ne peut pas faire de mal.

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Les huit de la Saint-Valentin (14 février)

Après le club des cinq, puis la bande des trois, ce sont les huit de la Saint-Valentin qui étaient de sortie ce matin. Huit Randos seulement pour fêter l’événement en chevauchant leur petite reine. Tout le monde ne peut pas en dire autant. Et dire que le temps était tout à fait clément : pas une goutte de pluie, peu de vent, température plutôt douce.
On avait commencé à neuf, mais Jean-Marie B. a vite renoncé, ne se sentant pas très bien. A vrai dire, il y avait aussi huit « étrangers », des amis du club surtout, qui aiment venir de temps en temps pomper nos parcours et sucer nos roues. Et tout ça sans verser un rond, une honte. Un seul ce matin a versé son obole, sous forme de poussettes, non sollicitées mais bien accueillies (vu que j’en étais le bénéficiaire) : donc, seul Marc H. a acquitté la taxe attendue. Les autres, les pingres, le doc Jean-Mi, le rappeur Jacques, faudrait qu’ils songent à casquer, nos caisses sont vides, les temps sont durs.

Si vous avez bien suivi, c’est donc à dix-sept, puis seize qu’on a d’abord roulé, jusqu’à Liverdun, où survient la première crevaison : c’est « l’Inconnu » qui crève, un homme en noir que j’ai déjà aperçu parmi nous, je ne sais pas qui c’est, il ne s’est pas présenté, et je n’ai pas pris le temps de le lui demander. A cinq, tranquilles, on prend les devants, en attendant le regroupement. Mais survient la deuxième crevaison (Nono) en haut de la côte de Villey-Saint-Etienne, et cette fois c’est nous qui allons rouler derrière un groupe de sept, qui poursuit son effort ; sept seulement, vu qu’à l’arrière l’Inconnu a récidivé, en s’offrant la totale (les deux pneus crevés simultanément), mais en étant à nouveau attendu, par trois d’entre nous. On est trop bons.

Compliqué, je sais, ce scénario. Mais grâce à la pause de Tremblecourt, les sept de devant, les cinq suivants et les quatre de derrière se retrouvent. Les huit Randos et les huit profiteurs, ce qui fait bien seize à nouveau. Vent arrière, ça déménage. Et ça finira par se disloquer, comme il se doit. Mais on aura pris un bon bol d’air, on se sera remis en piste, et on aura peut-être tourné le dos à l’hiver et aux intempéries. Qui sait ? Le printemps pourrait être précoce : près de chez moi, les prunus sont déjà en fleur ! A la mi-février, c’est du jamais vu.

Un dernier mot : Gaby m’a confirmé qu’il avait de fortes contusions, douloureuses, mais pas de fractures. Ci-dessous une photo de circonstance, histoire de sourire et de conjurer le risque de se faire emboutir par une bagnole.

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Les sept samouraïs (21 février)

Une « sortie idéale », c’est du temps doux et ensoleillé, pas de vent, une campagne riante, de la couleur, des fleurs, des montées agréables, de belles descentes, un peloton fourni, un rythme approprié… Au cours d’une année, il y a toujours quelques « sorties idéales ».
Les autres fois, on s’arrange, on fait contre mauvaise fortune bon cœur, on sort les impers, on s’habille chaudement, on s’organise contre le vent, et au bout du compte on se dit que ce n’était pas si mal, qu’on a bien fait de se lever, qu’il aurait été dommage de manquer cela.

Depuis quatre semaines, ils sont quelques-uns à apprécier ces sorties dont le charme est précisément de ne pas être idéales ; les plus nombreux s’abstiennent, et attendent patiemment le retour des beaux jours. Leurs splendides vélos en profitent pour rouiller, et eux pour faire du lard.
Vous le savez, de dimanche en dimanche se sont succédé le club des cinq, les trois mousquetaires, puis les huit mercenaires. Et aujourd’hui, me direz-vous ? C’était au tour des sept samouraïs de faire front contre les rafales de vent. Il y avait là les deux MJC Lillebonne, Jacques le skieur et Franck la pancarte ; les trois Dark Vador, Pierrot le tempo, Stéphane l’agronome, Marco le credito ; ajoutez Amico l’amical et votre dévoué secrétaire (sans qui vous ne sauriez pas ce qui s’est passé, bande de ronfleurs qui ne mettez pas le nez dehors, tas de dégonflés, de petits bras, de mollets à la gomme… mais je m’égare).

Vous l’aurez remarqué, d’une semaine à l’autre, ce sont en partie les mêmes qui sont au générique ; mais seul Stéphane aura fait les quatre sorties, le petit nouveau, qui s’est fait sa place, un homme de poids, c’est sûr, et puissant comme pas un (il pèse 40 kilos de plus que moi, faites le compte, mais si j’avais son rapport poids/puissance je monterais les côtes comme un avion).
Donc, on a roulé à sept, on s’est mangé un vent de sud-ouest carabiné, mais comme on a tourné dans le sens des aiguilles d’une montre, on l’a eu plus souvent favorable que dans la tronche. Le pied suprême, ce fut à Toul, quand on a pris à droite après le pont : tout à coup, plus aucune résistance, le silence, la glisse… un coup d’œil sur la cathédrale, puis la vitesse sans efforts… Magique !
C’est alors qu’on a échangé Franck, attendu dans cette charmante cité, contre Yves, le président, venu à notre rencontre. On demeure donc sept, vent arrière, véloces, euphoriques, avant la piste finale, et la dispersion.
Je me dois d’ajouter qu’on a aperçu un autre Rando, sorti sans son vélo, tout à son entraînement de futur marathonien : le Michel qui court, non plus Vélibest, mais Pédibest. Sans casque, mais quelle foulée !
Au fait, il n’est pas tombé une goutte ce matin.

Une info pour terminer (mais les lecteurs de l’Est républicain l’ont lu récemment) : à 80 balais, la remarquable Marie Marvingt (1875-1963), Auvergnate de naissance et Lorraine de coeur, a fait Nancy-Paris à vélo… Vous en dites quoi, les roupilleurs, les traîne-savate, les ectoplasmes, les camemberts mous, les attentistes, les timorés tristes ?

J’en profite, notez ça sur vos tablettes, les limaçons : le 300 km que je n’ai pas pu effectuer l’an dernier, vu que j’étais à l’hosto et tout cassé, je l’envisage pour le dimanche 12 juin. Cela vous laisse le temps de vous préparer, bande de flemmards.

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 La grande éclate (28 février)

La météo n’était pas pluvieuse, même s’il faisait froid et venteux. Aussi, pour le dernier dimanche de février, on aura noté un petit sursaut, un léger frémissement, un début de remise en route : 16 Randos de sortie, ça ne s’était pas vu depuis plus d’un mois. Evidemment, le peloton n’était pas homogène : ceux qui ont très peu roulé ces derniers temps ne pouvaient que peiner, d’autres qui ont roulé fort (dehors ou en salle) ont souffert… de devoir attendre ; et ceux qui roulé moyennement se sont tout naturellement retrouvés derrière ceux de devant, et devant ceux de derrière. On est logique chez les Randos, on ne peut pas nous enlever ça.

Donc, tout logiquement, ce fut la grande éclate quand le vent furieux fut venu, en pleine ascension vers Haussonville ; et l’éclate à nouveau sur la route dite « des sables », certains surfant sur les dunes, quand d’autres s’enlisaient. Rebelote à l’approche de Saint-Nicolas, d’autant que là, mystère, ceux de devant disparaissent : on aurait dû les retrouver sur la route de Ville-en-Vermois, nous (le deuxième groupe) qui avions choisi de prendre un petit raccourci (en tournant immédiatement à droite au lieu d’aller faire un tour dans le centre-ville). Bernique, on a revu personne : Gaby GPS aurait-il entraîné son groupe sur une fausse piste? Un retour direct sur Nancy ? Voici une chose pas logique, en tous cas.

Certains rouleurs vaillants de février n’étaient pas là, Pierre V, Stéphane, mais d’autres sont donc réapparus, Georges en tête, qui s’apprête à fêter ses 82 ans sur le vélo. Respect ! Le président a étrenné sa nouvelle machine, un Cannondale rutilant, haut en couleur, quasi fluo (les jours de brouillard, on est sûr de ne pas le perdre). Celui que j’avais appelé « l’Inconnu » était à nouveau présent, lui, j’en ai profité pour lui parler : il s’appelle Pierre Lemoine, il était et demeure licencié à Ligny-en-Barrois, mais il a déménagé sur Nancy, et se trouve très content de nous avoir adoptés. Un Pierre de plus dans le peloton. Pierre qui roule n’amasse pas mousse, mais trois Pierre ?  Maousse costaud, que c’est !

Attention, dimanche prochain on sera en mars, et en mars le RV c’est 8h30. Fin de l’hiver, fin des mini-parcours, il était temps qu’on s’y remette vraiment.
Reynald
PS : On a appris, hélas, que le beau-père de Nono est décédé  : la plupart d’entre vous ont connu cet homme très sympathique, puisqu’il nous a souvent rejoints (avec sa femme et sa fille) lors des repas du 200. Sa famille et ses amis honoreront sa mémoire mercredi, à 15h30, au crématorium du cimetière du sud.

Les motivés et les poltrons (6 mars)

Il se confirme que la plupart des Randos attendent la « sortie idéale » (douceur, soleil, pas de vent, campagne fleurie) pour mettre le museau dehors. Elle finira bien par arriver, qu’ils se disent… A moins qu’on soit dans une année bien pourrie, auquel cas on continuera de sortir en petit comité le dimanche matin.
Une fois de plus, j’ai donc l’impression non pas de faire revivre pour tout le monde ce qui s’est passé, mais d’informer les absents, autant dire la majorité des licenciés. Me voici au service des roupilleurs, des flemmards, des poltrons, des petits joueurs calfeutrés à la maison. Je sais, il y a les retraités qui sortent pendant la semaine, les privilégiés qui choisissent leurs jours, et qui préfèrent le dimanche taper la belote ou déguster des gâteries. Des bourges, des faux frères, une honte !

Comme d’habitude, pas une goutte de pluie ce matin, pas un flocon de neige, du vent, ça c’est sûr, de la fraîcheur, ce n’est pas faux, une sortie d’hiver tout ce qu’il y a de normal, bande de pleutres, fieffés lâcheurs. Au rendez-vous, dix motivés, qui n’ont pas regretté de s’être levés : Pierre l’aîné et Pierre le cadet, les p’tits nouveaux Jérôme et Stéphane, Amico et Marco les méritants Ritals, le Cri-cri et le Jean-Mi, auquel vous ajouterez Le Patou revenu d’Amérique et votre chroniqueur préféré. On dévale vers Toul, le nez au vent, on prend la piste du canal (seules trois barrières étaient fermées), et à Foug, le pauvre Patou se dit crevé, dans les deux sens du terme : réparation et retour au bercail, avec le petit Pierre, l’un ne s’étant pas encore remis du décalage horaire, l’autre dormant peu pour des raisons que la pudeur m’interdit de révéler.

Comme on était au pied de la longue côte, bien pentue, qui mène vers Laneuville et Lucey, je pars devant (sans attendre la fin de la réparation), histoire de ne pas retarder les escaladeurs. Le groupe de dix se divise donc en trois. Et je m’attends à être avalé tout cru un peu plus loin par les costauds déchaînés. Je me retourne souvent, mais le vent me pousse ; je fais une petite pause, j’attends, et je ne vois rien venir : nouvelle crevaison à l’arrière, gros coup de mou, erreur de parcours, détresse collective ? Je m’interroge. Et j’en viens à la seule hypothèse plausible : je roule trop fort, je vais trop vite, derrière ils tirent la langue, ils souffrent, ils s’énervent. A Villey-saint-Etienne, toujours personne. Je continue, je reste sur le parcours, mais plus loin, toujours seul, je ferai un petit détour, histoire de ne pas rentrer trop tôt, par la route de Bellefontaine et Champigneulles. Voilà ce que c’est que d’aller trop vite, non seulement on sème ses petits camarades, mais on est en avance sur l’horaire. Je me sens fort.

Je reverrai tout de même Amico dans les rues de Nancy : le groupe des sept avait lui aussi rallongé, à partir de Villey, en passant par Liverdun. J’en conclus qu’ils ont évité le raidard de Fontenoy, puis la remontée sur la forêt de Haye, et que je suis le seul à avoir atteint les 800 mètres de dénivelé. Un peu faiblards, les costauds. Je me sens seul.
Dimanche prochain, tenue d’été pour tout le monde, histoire de hâter le retour des beaux jours.

Dans le vent (13 mars)

C’est laborieux, on n’en sort pas, l’hiver joue les prolongations, mais tout de même, il y a un petit mieux. La preuve, on était ce matin 15 au rendez-vous, puis 17 sur la route avec le prompt renfort de Marcel et Nono. Et dimanche prochain, l’hiver laissera la place au printemps, du moins si l’on se fie au calendrier : vous noterez qu’on sera bien le 20 mars, et non le 6 comme indiqué par erreur sur le planning des sorties. Que je sache, on n’a pas encore inventé la machine à remonter le temps. On avance, on avance, et pas moyen de faire la route dans l’autre sens… air connu.

Celui qui était aussi de sortie ce matin, on l’a vite compris, c’est le dieu Éole, maître et régisseur des vents. Déchaîné même, qu’il était, l’épouvantable vent vif, le mistral lorrain, la soufflerie grandeur nature, la dépoussiéreuse haut de gamme, le ventilateur infernal, le bourreau des poumons, le démon des plaines, le rugissant du bitume… Le fléau, quoi, l’ennemi aussi sournois qu’invisible, une merveille d’énergie renouvelable, à n’en pas douter, mais qui a la vertu de la pomper, l’énergie peu durable du cycliste qui prétend l’affronter à la force du jarret. Consolation : si on le traite de ringard, il peut répondre qu’il est dans le vent !

Bref, il a fallu se battre. Et on s’est bien battus ; on a réussi à rentrer, rincés mais contents. Et pour un peu on serait rentrés ensemble, malgré les délestages successifs : le premier est intervenu plus tôt que prévu, Jean-Marie souffrant toujours des bronches, et attendu par ses deux amis du Pont fleuri ; le second tient à ce que Gégé s’est offert une variante solitaire (tiens, ne serait plus « sacré », le parcours ?) ; le troisième s’est effectué au retour, du côté de Pont-de-Mons, quand la majorité du groupe des 13 décide de rallonger par Ville-au-Val (histoire de reprendre le vent en pleine poire), alors qu’une poignée de paresseux dégonflés respecte bourgeoisement le programme.

Ceux-ci, on ne les reverra pas, à la différence des autres délestés, grâce à la crevaison fort bien venue que je m’offre du côté de Millery. On m’attend, c’est sympa, on m’aide, je me fais traiter d’intello, je ne répare pas assez vite, Marcel et Marco jouent de la pompe, faut voir comme. Mais le temps de remonter ensuite sur ma machine, c’est trop tard, tous partis comme une volée de moineaux. Je reviendrai sur les premiers délestés (à nouveau livrés à eux-mêmes), avant de finir seul, peinard, libre de songer à ma chronique dominicale.

Pour le premier jour du printemps (qui sera aussi le dimanche des Rameaux), on attend, on espère le retour des abstentionnistes de longue durée (dont on est sans nouvelles) : le commissaire Maigret, le colonel Grenouille, les frères Coaltar, le kiné Patrick, le boss Ouest Isol, le marathonien Michel, Jean-Luc le bâtisseur, Guy l’Africain, le Speedy Didier, le docteur Pansement, Joseph le Grognard… du beau monde.

PS : si vous êtes déçus par le Meldonium, revenez aux valeurs sûres (affiche de 1930 de l’Association de propagande pour le vin) :

 propagande-pour-le-vin-1930

Le printemps, enfin… (20 mars)

Le printemps, cela change tout : 18° au départ, 25° du côté d’Haroué, un franc soleil, un petit vent constamment favorable (il y des jours comme ça), des arbres en fleurs, de jolies routes sinueuses et ondulantes, de la douceur, des sourires, des jambes légères… une sortie presque parfaite. Qui eût été parfaite si tous les licenciés du club en avaient profité.
Mais le fait est que bien des marmottes ne sont pas encore réveillées. A moins que certains cyclistes aient définitivement renoncé à leur cher vélo, qu’ils l’aient troqué contre une canne à pêche, ou une boîte à outils, ou une brouette, allez savoir ?

Lors de cette prime balade printanière, ils ne furent donc pas plus de onze à fêter ensemble le renouveau. Mais il y eut aussi Gégé pour se concocter un parcours personnel, ainsi que Jean-Marie et Bernard pour choisir une autre option et une autre allure. Ce qui fait tout de même quatorze qui ont mis le nez dehors, et même un peu plus puisque sur la fin nous avons aperçu notre doyen (Georges) et notre éclaireur solitaire (Jean-Yves).

Et si vous voulez savoir (vous les abstentionnistes) qui composait le peloton des onze qui ont effectué le parcours, qui en ont même rajouté sur la fin, tant étaient puissants les charmes de notre « primavera », le mieux serait que vous veniez nous le demander de vive voix la semaine prochaine.
Vous pourrez même doubler la mise, puisqu’au parcours pascal de dimanche s’ajoutera celui du lendemain, qui se trouve être, c’est tous les ans comme ça, le lundi de Pâques. Promis, on roulera sur des oeufs, tout tranquillement, et même les cloches seront les bienvenues.
Bonne semaine,
Reynald
PS : six Randos ont participé mardi au premier VVV de l’année organisé par Gérard : lui-même, bien sûr, Pierre (le cadet), Christian, Jean-Claude, Gaby, et moi-même. 23 participants en tout. Un parcours vers la Meuse, Hattonchâtel, la tranchée de Calonne, le Montsec. Comme c’était encore l’hiver, il faisait plutôt frisquet, le soleil du matin a cédé devant les nuages et la pluie de l’après-midi, on s’est tapé dans les 140 km (et plus pour ceux qui étaient venus au RV de Millery à vélo, et dans les 1400 m de dénivelé. Un excellent entraînement pour la suite.

Pâques, mais pas que (27 mars)

Pour les uns Pâques demeure une fête religieuse, pour les autres ce sont deux jours de congé (et même trois quand le vendredi saint est aussi un jour férié, en Amérique latine, au Canada, par exemple, et bien sûr chez nos voisins de Moselle).
Nous avions donc programmé deux sorties pascales, ni catholiques ni orthodoxes. Deux façons de fêter le Renouveau, sinon la Résurrection. Toutes deux, hélas, noyées sous l’eau et emportées par le vent (du moins pour la plupart des Randos, j’imagine).
Faute de rouler, je me suis instruit – et cela tiendra lieu de chronique.

La coïncidence entre le profane et le religieux n’est pas fortuite, puisque la date de Pâques est toujours fixée selon une règle qui emprunte au vieux calendrier hébreu lunisolaire… c’est-à-dire ? Cette date est celle du dimanche qui suit la première pleine lune advenant pendant ou après l’équinoxe de printemps. Concrètement, cela peut aller du 22 mars au 25 avril. Cette année la proximité était donc forte entre le retour du Printemps et la Résurrection du sacrifié  (l’Agneau pascal) ; l’an prochain, les deux événements seront distants, puisque Pâques se fêtera le 16 avril ; et l’Ascension, 40 jours plus tard, le 25 mai – ce qui nous laissera plus de temps pour nous préparer à la grande sortie du 200 km ; la Pentecôte demeurera fixée 50 jours plus tard, comme son nom l’indique, mais en grec (pentêkostè hêméra = cinquantième jour), ce qui donne le 7e dimanche après celui de Pâques (inclus). On en apprend tous les jours.

Mais à Pâques on continuera de fêter le renouveau en ramassant des œufs, symboles de germination, œufs qui pourront avoir été apportés par des lièvres ou des lapins, symboles de fécondité – ce qui confirme la coïncidence entre coutumes païennes et fêtes chrétiennes.
Ce ne sont pas les marchands de chocolat qui s’en plaignent. Quand j’étais enfant, au siècle dernier, les œufs de Pâques étaient de vrais œufs, colorés, dispersés dans les jardins ; et on élevait des lapins qui faisaient beaucoup de petits, et qui souvent fournissaient le repas de fête du dimanche. Nostalgie.

La suite : à partir de dimanche prochain, on va enfin passer aux choses sérieuses : RV à 8h, pour des sorties qui vont se rallonger. Le programme va vous parvenir. Pour ce qui est du 200 Audax de l’Ascension (jeudi 5 mai), les choses sont calées, vous serez sous peu informés des détails. En gros, départ de Lunéville, petit-déjeuner à Raon-sur-Plaine, déjeuner à Dabo.

Si certains ont tout de même mis le nez dehors pendant ces deux jours, qu’ils m’en disent un mot, histoire que je complète les archives du club. Personnellement, c’est aussi la fièvre et des bronches encrassées qui m’ont interdit toute sortie.

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On met son imper et on serre à droite (3 avril)

Première sortie d’avril, comme des poissons dans l’eau nous fûmes. Que d’eau, que d’eau ! Du départ à l’arrivée, sans discontinuer, la flotte, la bruine, le crachin. C’est peu dire qu’ils se sont mouillés, les courageux de ce matin, plus ou moins étanches, plus ou moins perméables. Et plus ou moins persévérants. Car, si nous sommes partis à onze, Gégé s’en est retourné soigner son dos dès Villey-saint-Etienne, suivi du Patou des Corbières, tout ramollo du bulbe. Puis à Toul, c’est le Président humide et le Mousse mouillé qui rentrent directo sur Nancy. Restent sept, qui résistent au trempage, et qui s’offrent bientôt un moment rare de discussion avec la maréchaussée…

Je vous explique : à la sortie de Toul, nous sommes doublés par une voiture klaxonnante, qui s’arrête un peu plus loin ; en sortent un policier quelque peu bedonnant et une policière non moins considérable, le premier nous demandant tout à trac : « Qui m’a traité de connard ? » Bigre, comme si c’était notre genre. C’est Christophe qui se dévoue pour expliquer que l’un d’entre nous a dû dire « Serrez à droite » lors du passage de la voiture, et que jamais, au grand jamais, nous n’aurions proféré une telle insulte. Moment de perplexité du fonctionnaire, il a un doute, alors que, ça crève les yeux (les oreilles, plutôt) « Connard et « Serrez à droite », ça se confond facilement. Essayez pour voir. Mais pas auprès de n’importe qui. Toujours est-il que les suspects sont relâchés et que la police nationale nous conseille simplement d’être prudents à l’avenir… dans nos paroles, ou notre manière de rouler ? Ce n’est pas précisé.
Conclusion : quand vous traitez quelqu’un de « connard », dites-le clairement, articulez ! Et si vous vous voulez rester néanmoins courtois, dites quelque chose comme « Monsieur le Connard », c’est beaucoup plus distingué.

Ensuite, on continue de ramer, d’envoyer de l’eau, dans le toboggan de Sexey ; puis les Schwob père et fils (oui, Jean-Michel était accompagné de son fils, triathlète émérite et garçon fort sympathique) choisissent de rentrer par Maron. Les cinq obstinés qui restent pataugent derechef : outre Cri-cri, le nouveau médiateur du club auprès des forces de l’ordre, l’inusable Marco, le dur au mal Gaby, l’attentif Amico, et votre chroniqueur, bien sûr, puisque si je vous raconte tout cela, c’est qu’il fallait bien que j’en fus. Le parcours étant sacré, la balade pluvieuse se poursuit jusqu’à son terme – « thermes » serait plus approprié, vu la quantité d’eau dans laquelle nous fûmes immergés.

Christophe (il est décidément l’homme de la semaine) s’était inquiété du peu de préparation dont nous allions bénéficier avant notre grande escapade de l’Ascension. On ne peut pas dire que la sortie piscine du jour ait arrangé les choses. Restent les quatre sorties successives organisées par d’autres auxquelles nous allons participer : la sagesse serait que tous, ou du moins ceux qui ne peuvent pas rouler en semaine, choisissent à chaque fois le parcours le plus long ; en se rendant au RV à vélo, au besoin. Et puis, les actifs, je leur conseille de poser un RTT dès que s’ouvre une fenêtre de beau temps – qui sait, il y en aura peut-être d’ici le 5 mai.

S’agissant de dimanche prochain, il est évident qu’il faut rallonger le parcours, qui se limite à 70 bornes. Je n’en serai pas, hélas, mes attaches familiales me ramenant le week-end prochain du côté de Molenbeek (enfin, pas loin). Mais je compenserai en semaine, dès que la pluie s’arrêtera.

Rien ne sert de chuter (17 avril)

J’arrête le vélo ! J’en ai marre de me vautrer sur le bitume. C’est dur, le bitume, c’est sale, c’est pas fait pour qu’on s’y étale !
Déjà que je m’étais traîné pendant toute la sortie, rapport à des guiboles qui se souvenaient de ma première sortie montagnarde de l’année (qui remontait pourtant à jeudi)…  pas mon jour. Mais cette fois, rien de cassé, du vernis en moins, une belle escalope toute rouge en haut de la cuisse droite, un pouce gauche en charpie, quelques décorations sur le museau.
Ce que j’encaisse mal, c’est d’être tombé alors qu’il n’y avait aucune raison de tomber : un virage anodin dans Réméréville, pris à vitesse réduite, la roue avant qui se dérobe… c’en est même vexant de se retrouver à terre, pour rien, ça fait godiche.
Si j’étais superstitieux, j’y verrais un signe, un avertissement : si tu veux éviter les chutes, ne remonte pas sur ton vélo, t’as la poisse, coco, renonce ! Peut-être que je ferais bien de le devenir, superstitieux.

Sinon, la Seichanaise, ce n’était pas si mal, pas de pluie, des routes plutôt agréables, avec du vert tendre dans les bois, des fruitiers en fleurs, une amorce de printemps. Neuf Randos sur le grand parcours, six sur le moins grand, à ce qu’on m’a dit, une quinzaine en tout, dont quelques revenants, Speedy Didier et le bâtisseur Jean-Luc : encore un effort, les gars, et vous pourrez participer au 200 Audax.

Désolé, je vais m’arrêter là, j’ai du mal à taper avec la main gauche, ça me prend un temps fou.
Merci à l’amical Amico et au non moins attentif Patou qui m’ont remonté le moral et accompagné lors des derniers kilomètres.
Rien ne sert de chuter, faut arriver à point.

Complètement timbrés (24 avril)

« Les Timbrés de la petite reine », jamais sortie n’a mieux mérité son nom : un temps aussi glacial qu’en plein hiver (du moins au démarrage), une feuille de route qui datait de l’an dernier et qui, forcément, contredisait les flèches balisant le parcours, un éclaireur parti devant tout le monde, que dis-je, deux éclaireurs, qu’on n’a jamais revus, l’habituel Jean-Yves et un Pierre pressé ; quelques retardataires (comme Amico), des qui se sont trompés de groupe (comme Jérôme), une équipe présidentielle venue sur place très tôt pour s’inscrire sur le grand parcours mais qui se rabat sur un parcours moins long à cause du froid… équipe que la mauvaise feuille de route égarera et conduira à faire l’essentiel du trajet à l’envers !

Bref, on a tous failli devenir timbrés, puisque dans le groupe s’alignant sur le grand parcours, et parti le premier, on s’est également fourvoyé, à cause de cette fichue fiche périmée. C’est du côté de Moivrons qu’on a réalisé qu’on était sur le point de manquer le contrôle-ravito de Nomeny. Quelle horreur ! On a rectifié en ralliant Jeandelaincourt puis en bifurquant vers Nomeny. Mais on a alors trouvé le moyen de se scinder en deux sous-groupes (faut le faire), les uns (6 sur 9) passant par Lixières (quelle idée !), les autres par la route directe. C’est ainsi que ces trois-ci (un peu moins timbrés), Patrick, Nono et le secrétaire, ont fait la course en tête sans le vouloir. Car nous ne les avons jamais revus ensuite, les six qui avaient fait du rab, sinon furtivement au moment où les trois repartaient du ravito quand les six y arrivaient (enfin). Mais plus personne ensuite, une fois retrouvé le parcours 2016, du côté de Lemoncourt et Aulnois. Quelle route ont-ils prise après le premier ravito, les six qui avaient fait du zèle ? A cette heure-ci, je ne le sais pas.

Mais ce qui est bien certain c’est qu’on a eu la surprise de croiser l’équipe présidentielle en train d’effectuer le parcours en sens inverse. Étonnant spectacle. D’autant plus que cette équipe-là a dû passer par le second ravito (celui de Arraye-et Han) avant de passer par le premier ! Une logique de timbrés, vous dis-je. J’ajoute que personne n’était encore rentré quand nous, les trois sages, avons atteint l’arrivée. A moins que nos petits copains n’aient pas trouvé le chemin du retour ? Peut-être qu’en ce moment même ils le cherchent encore, confondant les années, ne trouvant plus les balises, trouvant le temps un peu long… On lance un avis de recherche ?

Ceci dit, il a fait soleil, la campagne était belle, le trajet gentiment vallonné mais pas trop. Il est vrai qu’on a manqué au départ la côte de Morey, mais on plaide non coupable. Et puis, mes deux compagnons et moi avons pris le temps de lever la tête, de deviser, de refaire le monde, de plaindre les plus égarés que nous, les plus timbrés, devrais-je dire. Autrement dit, ce fut pour nous une sortie plaisante. C’est tout le mal que je souhaite aux divers membres du club qui ont participé à la timbritude du jour. Combien en tout ? Pas moins d’une vingtaine, me semble-t-il : le 200 Audax approche, il y en a qui se disent qu’il faudrait tout de même s’entraîner un peu avant le 5 mai.
Au fait, il se confirme que la prévision météo pour ce grand jour est favorable.

Ascensionnelle et bénie des Dieux (5 mai)

Quelques mots sur la sortie du 200 km Audax du 5 mai 2016 :
Les Randos ne détestent pas le comique de répétition : chaque année, le jour de l’Ascension, ils grimpent, ils s’élèvent, ils touchent au ciel… mais à la différence du Christ, ils redescendent sur terre. Disons que leur gentille façon de célébrer l’Ascension n’est pas très catholique. Pour autant, elle n’est pas non plus halal, kasher ou zen. Laïque, tout simplement, et même un peu païenne sur les bords, si l’on invoque les Dieux anciens, ceux qu’ils ont réussi hier à mettre dans leur poche, à commencer par Éole et Hélios.
Éole pour le vent superbement favorable du retour, Hélios pour le franc soleil qui a régné toute la journée. Dire que cette journée fut bénie des Dieux est peut-être excessif, mais il y a du vrai là-dedans, après la longue période de temps pourri et de sorties gâchées qu’on vient de subir. Une preuve supplémentaire, c’est que personne n’a terminé cette journée aux urgences de Lunéville – j’avoue que je ne pouvais pas ne pas y penser, après ma peu clémente chute de Saint-Clément de l’an dernier. Pas de bobos, pas d’accident, ni d’incident (tout juste deux petites crevaisons sur la fin, pour faire plus vrai, puisque ne pas crever n’est pas vélo).

Association d’idées : à mon retour chez moi hier, on montre à la télé cette couverture décoiffante de Siné Mensuel, pour évoquer le décès du célèbre caricaturiste (Siné, qui se savait très malade) : « Mourir ? Plutôt crever ! » Bien envoyé, et j’ai presque envie d’en faire ma devise de cycliste vieillissant… Pas vous ?

Une belle journée donc, avec quelques routes nouvelles ou en tous cas peu habituelles pour la plupart des participants : la vallée de la Bruche de Schirmeck à Urmatt, puis la longue montée forestière vers le Nideck, le col des Pandours puis celui de Valsberg, le rocher de Dabo, le plan incliné d’Arzviller, les jolies routes vallonnées du retour, et quelques secteurs de pistes cyclables (loin des voitures et des assourdissantes motos, une vraie calamité, celles-ci). Deux lieux de restauration agréables et revigorants, et des grimpettes, des descentes, et encore des grimpettes. A mon compteur, 2400 m de dénivelé tout de même, ça compte, ça use. Et on se l’est tous dit, si le vent du retour avait été défavorable et tout aussi fort, quels dégâts, quelle détresse ! Et que de prétendants à une petite place dans la fourgonnette (qui a un peu servi, d’ailleurs, secourant quelques victimes de pannes de jambes ou de douleurs malséantes) !

En attendant l’assistance électrique, réservée aux plus de 70 ans, vive l’assistance éolienne, gratuite, écologique, efficace, le secret du vrai VAE. La limite d’âge pour moi, ce sera dans deux mois (déjà ? Je ne le crois pas). Pas de quoi être fier, je sais, mais on se console comme on peut, à l’idée de troquer un VAE pour un autre VAE. Et songez-y, après le repas, quand Brigitte eut convaincu son Gérard de faire avec elle le retour en voiture, j’étais tout de même le doyen de la randonnée. Un peu de respect, jeunes gens ! Et songez à vous cotiser, en répétant tous en chœur : un VAE pour le doyen, un VAE pour le doyen !
Vivement le prochain 200 km Audax, je sens que je vais voler, vent favorable ou pas. Au fait, on n’a pas respecté la moyenne de référence : même moi, qui ne me suis pas dépouillé dans les montées ni décarcasser lors du retour, j’ai 23,4 de moyenne à mon compteur (et 213 km). Excès de vitesse. Mais disons que c’est la faute à Éole, qui s’est dépensé pour nous sans compter.

Maintenant, repos. Et ne faites pas les malins, vous aussi vous êtes un peu tannés, vous aussi avez besoin d’un bon massage, vous êtes prêts à payer le prix fort pour un bon massage (je sens que Brigitte, qui s’y connaît, va s’enrichir. L’odeur du Baume Saint-Bernard me monte au nez, un vrai délice).
Et merci aux trois valeureux accompagnateurs.
Quant aux deux fugueurs de la fin de parcours (je suis charitable, je ne les nommerai pas), souhaitons-leur de se remettre la tête à l’endroit. Il y a des choses qui ne se font pas. Mais je sais, avec la fatigue, on ne s’appartient plus. Admettons qu’ils étaient vraiment très fatigués, et qu’ils avaient vraiment perdu la boule, les deux fugitifs. L’année prochaine, on les nommera capitaines de route, ils ne pourront pas se faire la malle.

Une randonnée de charme (8 mai)

Première sortie vraiment printanière, une certaine douceur dès 8h, un bon soleil ensuite, un vent plutôt discret… on n’avait pas connu pareille fête depuis bien longtemps. Ce qui a poussé quelques abstentionnistes de plus ou moins longue durée à réapparaître : Eric, dit le commissaire Maigret, enfin remis d’une vilaine sciatique, Patrick, le kiné au doigt d’or, Jacques, le Vosgien ailé, Franck, le dentiste carpinien (eh oui, je n’invente rien), Marcel, de retour de son stage dans le Beaujolais (bonjour les dégâts). Nombre de pédaleurs de l’Ascension étaient également au rendez-vous, quelques-uns manquaient, dont le président et ses fidèles compagnons du Pont fleuri, tandis que d’autres l’avaient manquée, la traditionnelle et immanquable grande randonnée annuelle de notre club. En tout, une bonne vingtaine de pédaleurs ont répondu présents, pour parcourir la vallée de la Moselle, dans les deux sens, du tout plat rive gauche, puis du petitement vallonné rive droite.

Ce fut donc un parcours peinard, avec un semblant de grimpette à mi-chemin, à l’occasion de l’aller et retour au Haut du Mont, lieu de mémoire de la bataille de Lorraine en 1914, large point de vue sur la vallée, sur la cité de Charmes (celle des Carpiniens, vous avez la réponse) et les contreforts des Vosges. Une sortie d’abord très fluide, unitaire, rapide mais sans excès, jusqu’à ce qu’à la vue de la grimpette, Stéphane se dise « Plutôt crever ! ». Et donc il creva, répara, et recreva. D’où un certain émiettement du peloton au retour, les uns attendant le facétieux crevard, les autres, peu sûrs de leur état de forme, préférant aller de l’avant. Mais tous, à n’en pas douter, ont apprécié à sa juste mesure cette première sortie presque idéale, cette randonnée qui ne manqua pas de charme.

Comme c’était le 8 mai, on a aperçu des cérémonies de la Victoire. Ce qui me fait dire, une fois de plus, que si le vélo est toujours une leçon de géographie, et de topographie, c’est toujours également une leçon d’histoire, il suffit de creuser un peu. Un seul exemple, la cité de Charmes, deux fois traversée aujourd’hui : dès le Xe siècle, on y édifia une enceinte fortifiée pour se protéger des raids hongrois ; en 1475, elle fut pillée et incendiée par Charles le Téméraire, alors en guerre contre le duc de Lorraine ; deux siècles plus tard, Lorrains et Français ne mettaient toujours pas leurs oeufs dans le même panier, et la ville fut à nouveau incendiée, par les Français (en 1635). Pour mémoire, le rattachement définitif de la Lorraine à la France ne remonte qu’à 1766. A l’échelle de l’Histoire, nous sommes des Français de fraîche date. Et puis, les deux guerres mondiales sont aussi passées par Charmes. En septembre 1944, alors que pour eux la fin est proche, les Waffen SS pillent, brûlent, massacrent, et déportent plus de 150 personnes, dont une centaine ne reviendra pas.

Soyons plus légers : saviez-vous que la levrette fut une spécialité de Charmes ? Et que la levrette figure toujours dans son blason ? Mais ne vous méprenez pas, la levrette était une confiserie chocolatière… vous allez me dire… je vous arrête !
Charmes vit naître Maurice Barrès, dont je vous ai conté naguère le périple à bicyclette le long de la Moselle, un pionnier, en somme. Et comme nous sommes aussi passés par Chamagne, j’espère que vous avez eu une pensée pour le peintre Claude Gellée, dit « Le Lorrain », natif du lieu, et éventuellement pour la royale Ségolène, autre native, sans oublier que notre Patou des Corbières a joué là enfant avec les nombreux frères de la future candidate à la présidence de la République. Eh oui, la grande Histoire et la petite histoire, on s’y promène dès qu’on enfourche son vélo.
Reynald
PS : j’ai oublié de donner dans mon compte rendu sur la sortie de l’Ascension d’indispensables précisions (Marcel, le beaujolman, me l’a fait remarquer) : nous étions 18 pédaleurs, nous avons mangé de la flammeküche et du baeckoeffe, Alsace oblige, nous n’avons pas glissé sur la neige de la Schneethal ni été mordus par le loup de la Wolfsthal.
Et ceci en cadeau, le blason de Charmes et sa description : D’azur à la levrette d’argent, tenant en ses pattes une croix de Lorraine d’or.

blason-de-charmes 

Les côtes de Toul (15 mai) : comme un oignon

Pelons, pelons l’oignon, le club des Randos était ce jour comme un oignon.
La première couche est celle des lève-tôt, des gros rouleurs qui s’élancent sur « le grand parcours », 125 km, ce qui est beaucoup et bien peu pour de forts appétits ; ils sont une poignée, ils ont un peu froid, mais leur énergie les réchauffe, les Cri-cri, Gaby, Marco, Patou, et je ne sais qui d’autre (Amico, Jean-Luc ?).
La deuxième couche est toute fine, elle se réduit à une unité, un Pierre venu de Nancy à vélo et devant y retourner dans des délais impératifs. Seul, le voici parti. Mais avançons, pelons, pelons l’oignon.
La troisième couche est composite, elle ne résiste pas longtemps, la douzaine d’éléments qui la composent se dispersent bientôt. Elle se dépiaute donc en d’autres couches.
Une pour le duo de Bouxières, le duo qui fonce et qui ne repassera pas par Toul, faut pas pousser qu’ils disent, le Mousse et le Beaujolman.
Une autre couche pour les as du Pont fleuri, qui ne foncent pas du tout, eux, qui s’arrêtent, hésitent, et laissent filer le petit groupe des moins endormis. Ceux-ci repartent du ravito quand ceux-là y arrivent. Un se divise en deux, disait le président Mao.

Epluchons, effeuillons, et voici donc réunis le Jean-Mi et le Jean-Claude, qui plus tard s’en repartiront, séparément, vers leurs pénates sans repasser par l’Arsenal, eux non plus. Ils abandonneront le Jean-Marie S. et le secrétaire, qui finiront par se retrouver seuls, une fois perdu le petit nouveau de Tonnoy (Philippe, qu’il s’appelle, ex-Meusien et néo-Tonnagien, qu’on avait rencontré la semaine dernière et qui est venu en 2e semaine). Que de feuilles éparpillées ! Mais on aura aperçu Guy dans son VAE, je dis bien « dans » et non « sur », puisque c’est dans sa Renault Zoé toute électrique qu’il se balade, l’Africain des Baronnies.

Si vous avez bien compté, pelez, pelez l’oignon, on en est à sept ou huit couches, pas moins, enlevées tour à tour, chacune emportée au gré du vent. Et je n’ai pas de vue d’ensemble, il est probable que d’autres couches, d’autres feuilles se sont séparées en chemin.

L’oignon qu’on épluche est réputé pour ses effets lacrymogènes. Pleurons donc, pleurons sur l’unité perdue… Autrefois, le club n’était pas un oignon, il était d’un seul tenant, on pratiquait le rouler-ensemble, du moins le plus souvent. Mais je vous parle d »un temps où les Côtes-de-Toul n’étaient pas encore devenues les Plaines-de-Toul, où l’on partait parfois pour la journée (180 km), où l’on découvrait donc des routes nouvelles et nombre de grimpettes. Heureux temps !
Mais, n’en doutez pas un instant, demain l’oignon friable aura cédé la place à une pomme consistante : seule la peau peut s’en séparer.
Deux groupes, ça c’est raisonnable. Et ce n’est même pas fatal.
RV porte Désilles à 8h.

Lundi de Pentecôte : la pomme de la concorde

Savourons, savourons la pomme, le club des Randos était ce jour comme une pomme.
Un grand prophète l’avait prédit : comme une pomme intègre, d’un seul tenant, un bloc compact, composé de onze compagnons unis, on se croirait revenu au bon vieux temps. Onze chevaliers de la manivelle, et même douze apôtres du braquet pendant un court moment (avec l’apparition de Gégé, ou de son double, on ne peut trancher, sachant qu’il a effectué hier une grande partie de la Guy Cividin) : n’empêche que c’était un clin d’œil aux douze apôtres qui furent visités par l’Esprit Saint, raison pour laquelle l’Église fête la « Pentecôte » – c’est-à-dire le « cinquantième jour » après Pâques, vous ne pouvez plus dire que vous ne le savez pas si vous lisez régulièrement cette chronique. On pédale et on s’instruit, c’est la devise du club.

Donc, étaient revenus goûter la fraîcheur de la mi-mai huit des amateurs de Côtes-de-Toul. Détaillons : deux des gros rouleurs d’hier, Cri-cri et Marco, auxquels il convient d’ajouter ceux qui étaient venus à l’Arsenal à vélo, les Jean-Mi, Jean-Claude, Christian ; et les moyens rouleurs d’hier, Pierre E., Philippe et moi-même. Et à ces huit récidivistes se sont ajoutés Michel, Stéphane et Jérôme. Vous savez tout, les estivants, les pionceurs, les petites natures, qui avez reposé vos petits mu-muscles au lieu de faire grossir la pomme.
Il est vrai que si l’on avait été davantage, on ne serait pas restés groupés, le naturel serait revenu au galop. Merci, par conséquent, aux abstentionnistes. Et savourons, savourons la pomme.

Sachez tout de même, les pantouflards, qu’on a pris un pied terrible ce matin : beau parcours, bien vallonné (près de 900 mètres de dénivelé, autre chose que les défuntes « côtes » de Toul), agrémenté de champs de colza à perte de vue, d’arbres fruitiers en fleurs, de paisibles troupeaux, de bêtes sauvages gambadant dans les champs, d’accortes villageoises sur le pas de leur porte, de fanfares saluant notre effort… le lundi de la Pentecôte est une fête, et vous l’avez manquée !

Dimanche prochain, on fêtera la pomme de la concorde revenue, du moins on essaiera, cela va valoir le coup de participer à l’événement. RV au Buffalo grill, ce qui donne le ton d’une sortie où il faudra monter avant de penser à descendre. Il suffira de pédaler en dedans quand ça monte, et de monter en régime quand ça descend. Tout de même pas compliqué !

Aux pommes (22 mai)

Une grande première en 2016 : il faisait doux dès le départ de la randonnée ! Le soleil était aussi au rendez-vous, et il a eu la bonté de nous accompagner tout du long. Quand un vilain nuage noir est venu nous menacer sur le coup de 11h, le vent l’a chassé. Nous, c’est-à-dire les 13 présents, bientôt réduits à 12 puisque l’électrique Vosgien n’était venu là que pour nous narguer un court moment avec sa Cancellera Bike (il a fait le Jacques, en somme). En fait, un quatorzième avait mis le nez dehors, qui a fait la course en tête et en solitaire, qu’on n’a rattrapé que du côté de Xeuilley : Jean-Marie B., bien connu comme étant à la fois le champion d’Azelot, le délégué présidentiel et le représentant du Pont fleuri.

Donc, nous ne fûmes jamais plus de 13 à pédaler ensemble, la faute aux absents : les « Ardéchois » de Gégé, les fondus du plumard, les excusés, les inexcusables, les déficients, les empêchés, les pêcheurs à la ligne, les Bouxiérois, les vététistes, les ratons-laveurs et les éléphants roses. Oui, ça fait du monde.

Le vent défavorable, les côtes, l’incapacité absolue pour les costauds de « rouler en dedans » n’ont pas permis que nous roulions constamment groupés jusqu’au lieu prévu de la séparation en deux groupes (Colombey-les-Belles). Pour mémoire, le nouveau contrat (décidé en AG), c’est que les plus rapides peuvent prendre leur envol une fois parcouru le premier tiers de la sortie, ce qui leur laisse, si je compte bien, les deux tiers restants pour s’éclater. Pas si mal. Mais ce qui est attendu de tous en retour, c’est de jouer le jeu du peloton unique avant la séparation. Être attendus en haut des côtes, pour les moins véloces, est une chose, être abrités en est une autre, encore plus appréciée. Le répéter est lassant. Et d’ailleurs, à chaque fois je dis que c’est la dernière fois que je le dis. Je cesserai donc de le dire quand je me tairai. De même que les absents ne le seront plus quand ils seront là. Un peu de philosophie, ça ne peut pas faire de mal.

Je note qu’après l’hommage rendu aux Belles de Colombey, le paradoxe est qu’il n’y a pas eu moyen de se séparer, malgré les efforts de lenteur de ceux de l’arrière. On n’a pas cessé de se regrouper, à la faveur des carrefours (c’est où qu’on va ?), des obstacles naturels (la fameuse passerelle de Goviller – que l’intrépide Jérôme a évité en passant à gué, et sans se noyer), à la faveur aussi de la pause de Laloeuf, puis du fort vent devenu favorable qui nous a tous propulsés comme un seul homme, quel bonheur !
Aux pommes, cette virée qu’on a fait là, j’peux pas mieux dire !

Un bien beau parcours, qu’ils ont dit, ceux qui le découvraient, les petits nouveaux et les intermittents. Je souscris, et confirme que cela vaut la peine de partir parfois de Brabois pour aller un peu plus loin qu’à l’habitude. Ce sera le cas également lors des deux sorties de juin avec départ à 7h30 (les 5 et 19 juin), une excursion vers la Moselle (en Pays du Saulnois), et une autre vers la Meuse. Deux longues sorties à ne pas manquer. Rouler pour voyager et découvrir, c’est plutôt mieux que rouler pour rouler, non ?
D’ailleurs, je vais convier à quelques sorties « exotiques » ceux qui seront ou se rendront disponibles en semaine, histoire de bien profiter des meilleurs moments de l’année. Et de voir du pays. Précisions vont suivre.

Pas de vélo sans sel (5 juin)

Premier rendez-vous de l’année à 7h30, première occasion de dépasser les limites habituelles de nos escapades : un petit tour en Moselle, au-delà de Réchicourt-la-Petite, avec le pays du Saulnois, les communes de Blanche-église (le point le plus éloigné) et de Marsal, l’antique cité du sel. Il faut en dire un mot.
« L’or blanc » y a été exploité dès avant l’occupation romaine, et la cité lui doit son ancienne prospérité. Elle comptait encore 1200 habitants vers 1850. Elle a été souvent convoitée à travers son histoire, et à une époque où la Lorraine n’était pas encore française, elle a été accaparée par Louis XIV, et fortifiée par l’inévitable Vauban. La Fontaine, mieux inspiré quand il écrivait ses fables, s’est fendu d’un poème à la gloire de l’accapareur (fallait mériter la pension royale).

Du passé salin de Marsal témoigne le musée du sel, que nous n’avons pas pris le temps de visiter. Musée logé dans la Porte de France, sous laquelle nous sommes passés, cela ne vous aura pas échappé (voir photo). Mais pour moi comme pour certains d’entre vous, le sel de l’histoire, si je puis dire, c’est l’affaire du « mage de Marsal » : un illuminé qui fut soupçonné d’avoir fait disparaître ses deux enfants (fin1968), alors qu’il invoquait un enlèvement par des ravisseurs mystérieux. Il fit de la prison, pour mauvais traitements supposés, et de l’hôpital psychiatrique, mais le fait est que l’affaire ne fut jamais élucidée et se termina, en 1974, par un non-lieu. Le mage, c’était Daniel Gérard pour l’état civil, mais il se faisait appeler Swami Matkormano, tandis que sa femme Josyane jouait le rôle de la prêtresse Alfeola (qui fut elle aussi internée), dans un culte inspiré de l’hindouisme… On avait de l’esprit naguère en Lorraine, quand le mage de Marsal faisait concurrence au pape de Clémery.

Quant à la balade elle-même, disons qu’elle a rassemblé quelques 18 allumés du pédalier, qu’elle fut agréablement vallonnée et rondement menée, dans la douceur et sous le soleil. La forme est là, c’est manifeste, le peloton se désagrège peu, le mois de juin commence bien, il flotte un petit air de jeunesse.

Un mot sur les « excursions du jeudi » : la dernière, avancée à mercredi pour cause de météo, a réuni 7 participants, elle a permis (c’est le but) de découvrir des routes nouvelles, au-delà d’Hattonchâtel, du côté de Jarny et de Gorze. Sous le soleil, là aussi, et dans la bonne humeur. Jeudi prochain, place à la sortie VVV de Gérard ; la semaine suivante (rappel), le 16 juin, l’inédit et formidable Tour du Luxembourg, au départ d’Echternach (précisions suivront) : réservez votre journée !

marsal

Bientôt l’été (19 juin)

Deuxième sortie de l’année avec départ à 7h30 : on a donc pu aller un peu plus loin que de coutume, en frôlant Vaucouleurs, en empruntant quelques routes champêtres de la Meuse, en traversant le décor de western qui précède Pagny-la-Blanche-Côte, la bien nommée, avant de rejoindre la cure d’Uruffe, de sinistre mémoire – mais comme j’ai déjà évoqué le curé libidineux et meurtrier qui l’occupa, je passe. N’empêche, avec le mage de Marsal, le pape de Clémery (l’auto-proclamé Clément XV) et cette brebis égarée d’Uruffe, on tient là un fameux trio !
On a moins l’occasion de passer par la Vologne, sinon vous auriez droit à un résumé de l’affaire Grégory.

Comme l’été se fait attendre, on a eu droit un petit crachin au départ, rapidement dissipé, et à une fraîcheur qui, elle, nous a gentiment accompagnés tout du long. Échapper aux coups de soleil, c’est appréciable.
Nous étions 16 à profiter de cette belle et longue sortie, assez vallonnée (117 km et 1220 m de dénivelé à mon compteur) ; 12 pour ce qui est du parcours complet, les 4 autres préférant écourter. Mais ils auraient été avisés de le déclarer bien fort, cela aurait évité à quelques bonnes âmes de les attendre en vain. La séparation, prévue à Blénod, s’était effectuée tout naturellement à la faveur de la longue côte qui agrémente le village (pardon, le bourg, 4400 habitants tout de même). La logique était donc de continuer sans attendre la pause de Chalaines. On a encore du mal parfois avec les propres règles que nous nous sommes fixées.

Comme la sortie fut rondement menée, on a failli rentrer beaucoup trop tôt : le petit détour par la charmante route montante qui relie Chaudeney à Villey-le-Sec fut donc le bienvenu. En outre, cela a permis aux valeureux qui vont se taper le BRV dimanche prochain d’ajouter quelques mètres de grimpette à leur préparation. On aura une pensée pour eux : Marco, Cri-cri, Nono, Michel (et Jacques, qui n’était pas là ce matin). Qu’ils pensent à « s’alimenter », comme disait Jacques Anquetil…

Excursion du Luxembourg (23 juin)

La météo enfin favorable a permis la réalisation du projet Luxembourg. Douceur au départ, conditions idéales, on se promet une belle et grande journée. Ils se frottent les mains, les heureux expatriés du jour : Patrick N., Jean-Marie S., Gaby, Francis, Philippe et moi-même.
Mais bien vite la température monte, comme la route, et dieu que ça monte dans le premier gros et long raidard de la journée, ça monte et ça chauffe. Déjà on a compris : ce sera une belle journée, mais dans le genre caniculaire, une journée à « chasser la canette » et à chercher l’ombre. Donc, dans l’après-midi surtout, nous avons recherché les routes ombragées, moins vallonnées que celles qui étaient prévues, nous avons multiplié les arrêts pour nous asperger d’eau ou remplir nos bidons. Après tant de journées fraîches depuis le début de l’année, ce brusque cagnard a vraiment été une épreuve.
On s’est donc contenté de 1330 m de dénivelé au lieu des 2400 m prévus, pour une distance semblable (131 km au lieu de 135). Et on s’est tapé deux côtes à la fois longues et très pentues (plus de 10 % et jusqu’à 15%), que la prochaine fois on pourra éviter. Disons qu’on a fait une reconnaissance, qu’on a pris nos repères.

Ce qui n’enlève rien à l’essentiel : le Luxembourg est un petit paradis pour le vélo ! Nombreuses petites routes très bien entretenues, peu de circulation (parfois plus de cyclistes que d’automobilistes), pistes cyclables un peu partout, au long des rivières souvent (une vue très rafraîchissante, hier), parfois sur l’emplacement d’anciennes voies ferrées et … toujours sans barrières ! On croit rêver, se passer de barrières, c’est possible !

Quant au paysage, dès qu’on monte un peu, il prend de l’ampleur, il offre de beaux points de vues sur un mélange de champs et de forêts, sur les petits villages avoisinants. On monte à 400 m et plus (465 m hier), ce n’est pas de la haute montagne ni même de la moyenne, mais le contraste des reliefs (plaine sous les 150 m) suffit à se remplir les yeux, et à se faire mal aux pattes ! On traverse aussi de très belles petites villes, comme Vianden, Diekirch ou Larochette, on se repose dans les vallées ombragées de la Sûre, de l’Alzette ou de l’Ernz noire. Quant à Echternach, un regret : nous n’avons pas eu le temps de flâner dans le coeur ancien de la cité, ses vieilles pierres, sa place centrale et ses ruelles (a fortiori pas eu le temps de monter jusqu’au point de vue très élevé qui domine la ville, ni d’aller se promener au bord du lac).

Nous nous sommes restaurés à Diekirch, en terrasse, et à l’ombre, dans le vieux quartier piétonnier. Y déguster la bière locale, je vous laisse deviner quel plaisir ce fut… Même que certains en ont repris. A ce sujet, vous savez comment on dit « Occupe-toi de tes oignons » en allemand ? Kummere dich um dein Bier, c’est-à-dire : Occupe-toi de ta bière ! A replacer le moment venu.

Anecdote : lors du retour, Philippe s’est arrêté, sans prévenir (le coquin) à l’entrée d’un village (Angelsberg) pour aller quérir de l’eau, et nous un peu plus loin auprès de deux dames compatissantes. Pendant qu’on s’abreuvait, Philippe est passé sans nous voir, et sans que nous le voyions. On l’a cherché, attendu, avant d’observer qu’il y avait au carrefour tout proche une pancarte indiquant la direction d’Echternach. On en a conclu qu’il avait filé par là en pensant rouler derrière nous… On ne l’a jamais rattrapé, mais il est arrivé une demi-heure après nous ! Explication : en suivant les pancartes, il s’est tapé quelques grosses côtes que nous avions soigneusement évitées en passant par la vallée de la Müllerthal. Moralité : toujours rester groupés !
Autre anecdote : il y avait une seule racine sur les pistes cyclables : j’ai cru bon de faire sa connaissance, à 100 m d’Echternach, notre « point de chute ».

Réflexion concoctée par Francis et moi-même lors du voyage de retour : étant donnée la distance (150 km,1h45 de trajet) de Nancy à Echternach (une localité par elle-même très belle et qui permet d’aller découvrir le centre et le nord du Luxembourg, les régions les plus jolies), il serait plus judicieux d’y aller pour deux jours, avec une nuit d’hôtel ou en chambre d’hôtes. On programmerait une grosse sortie le premier jour, et une sortie allégée le second. A creuser. Et à faire par un temps ensoleillé mais nettement moins chaud.
Autre solution (mais qui ne laisse pas le temps de faire autre chose que du vélo) : partir de Nancy dès 6h du matin.

echternach compagnons

vianden

Rouler en papy (26 juin)

Jeudi, c’était la canicule, les randonneurs du Luxembourg s’en souviendront. Hier dimanche, retour à la normale : beau temps mais rien de trop, un temps propice pour le vélo. Quatorze nous sommes au départ, et quasiment autant à l’arrivée, une fois résorbée la séparation des deux groupes. Puisqu’elle se fit, la séparation, un peu après l’endroit prévu, mais avant les deux « juges de paix » qui se dressent entre Vic-sur-Seille et Châteaux-Salins. Deux raidards qui de toute façon séparent plus qu’ils ne rapprochent.
Des raidards qui nous ont fait songer aux forçats du BRV : nous, nous avons pu en baver pendant quelques brèves minutes, mais eux, ce fut pendant combien de temps ? Et combien de fois ? Mais ils sont si jeunes, si costauds, si vaillants, les Randos montagnards, qu’ils ont dû n’en faire qu’une bouchée, des cols vosgiens. Je me trompe ?

Ensuite, plaisir de retrouver les routes presque lointaines de la Moselle ; des routes étroites, vallonnées, anonymes parfois, puisqu’on fait des économies de pancartes du côté de Hampont ou de Dalhain … Ce qui oblige à demander son chemin. Faut dire que précédemment on faisait le parcours dans l’autre sens, on avait ses repères. On a même perdu, un court moment, le maître des parcours (Pierre) et son fidèle lieutenant (Jean-Claude) : le premier a des excuses, il revenait direct de Toronto ; le second n’en a pas, son « décalage » n’a rien d’horaire. Mais cette fois, on n’a pas perdu Philippe, il y a du mieux. Ni perdu Patrick le kiné à l’arrière (dans son cas, l’exploit est double, vous m’aurez compris).
Et pendant ce temps-là, ils perdaient qui, et encore qui, les fêlés du BRV ?

La route était longue pour un parcours débutant à 8h, mais en juin la forme est là, les kilomètres s’ajoutent aux kilomètres, on ne voit pas le temps passer, on n’est pas pressé de rentrer. Mais gare, autrefois c’est le pinard qu’on appelait le brouille-ménage : désormais, ce pourrait bien être le vélo. Toutefois, réfléchissons : c’est de leur faute, elles n’ont qu’à s’y mettre, au vélo ! Et l’assistance électrique, elles y ont pensé ? Et leurs maris, ils attendent quoi pour la leur offrir ?
Tout problème a sa solution. N’est-ce pas, les allumés du BRV, vous qui avez multiplié les aides au pédalage, ne dites pas le contraire.

Confidence : depuis mercredi, 22 juin 2016, je peux me permettre de rouler en papy. Donc, jeudi et hier dimanche, malgré ma forme éblouissante du moment, j’ai roulé en papy. Car il est né, enfin, le divin enfant, mon premier, mon unique petit-fils. Il est très beau, il pèse 4 kg, sa maman (ma fille) et lui-même se portent bien. Il est né à Bruxelles. Je vous fais grâce de vos blagues belges.

Les carrefours (3 juillet)

Le départ dès 7h30 a permis à nouveau d’emprunter des routes plus lointaines, au-delà de Landécourt et de Franconville, dans les marges de la plaine des Vosges. On a pu d’ailleurs en apercevoir la fameuse ligne bleue, et le massif du Donon. Le parcours concocté par Pierre Valois, qui avait inclus malicieusement un petit détour par le village du même nom, était fait de petites routes bien agréables, parfois vallonnées, mais sans grande difficulté. Une vraie réussite.

Tout le monde n’étant pas en vacances, ce sont 18 gros travailleurs du cycle qui ont profité de cette longue et belle sortie, dans l’harmonie la plus totale : sauf erreur de ma part, les 18 sont restés groupés de bout en bout, les uns se permettant tout au plus de ralentir parfois la cadence et de prendre quelques raccourcis, les autres s’arrêtant ou ne s’arrêtant pas lors de la crevaison du jour, ou lors de la perte de quelques éléments. Ce qui prouve simplement qu’il ne faut pas en rester à une conception trop étroite de la notion de groupe… Disons qu’il y a des groupes compacts et des groupes qui le sont moins. Ayons l’esprit large. Et admettons qu’aux carrefours on puisse se tromper de route.

Il est vrai que pour parcourir 120 bornes et se taper 1000 m de dénivelé en respectant les horaires, il ne faut pas trop lambiner. Mais s’obliger à rentrer pour midi lors d’un très estival dimanche de juillet, m’est avis que c’est un peu bêta. Prendre le temps d’apprécier chaque kilomètre parcouru, chaque point de vue sur les champs et les bois, les vaches et les moutons, sur les villages et les églises, ce n’est pas une mauvaise façon de faire du vélo, me semble-t-il (pas comme ces tarés qui nous ont doublé sur la fin, la tête dans le guidon, et qu’on a vu se disloquer un peu plus loin).

Ces jours-ci, plusieurs hommes célèbres ont disparu, Michel Rocard, le cinéaste Michael Cimino, l’humaniste Elie Wiesel. Les médias en parlent d’abondance ; mais, à quelques exceptions près, ils ont souverainement ignoré la mort (à l’âge de 93 ans) de l’un des plus grands poètes français contemporains, Yves Bonnefoy. Comme un clin d’œil, je me permets de recopier ici cette petite réflexion qu’il a proposée sur les carrefours. Vous savez, les carrefours, qui sont une réalité si problématique pour les cyclistes que nous sommes (on va où, tout droit, à gauche, à droite ? T’es sûr, pas de regret ?) :

J’ai souvent éprouvé un sentiment d’inquiétude à des carrefours. Il me semble dans ces moments qu’en ce lieu ou presque : là, à deux pas sur la voie que je n’ai pas prise et dont déjà je m’éloigne, oui, c’est là que s’ouvrait un pays d’essence plus haute, où j’aurais pu aller vivre et que désormais j’ai perdu.

 

Dolomites (1er– 8 septembre 2016)

Heureux qui, comme Cycliste, a fait un beau voyage…

La dolomite est un minéral carbonaté composé de calcium et de magnésium.

  Sa formule chimique est CaMg (CO3)2. Ce minéral riche de calcium et de magnésium dont l’élément majeur est la dolomie, roche des Dolomites, fut nommé en l’honneur du minéralogiste Déodat Gratet de Dolomieu (1750-1801), qui l’identifia et la différencia de la calcite.

À la demande générale (ou presque), je vous livre mes impressions sur le formidable séjour dans les Dolomites que nous venons de vivre. Il s’agit d’un compte rendu tout à fait subjectif et quelque peu décalé. Pour ce qui est des faits et des chiffres, nous nous en remettons à Gérard. Personnellement, même si mon compteur me donne nombre d’indications chiffrées, que je ne peux pas ignorer, mon intérêt et mon plaisir se situent ailleurs : pour l’essentiel, dans la découverte et dans le partage. Sur ce double plan, nous avons été servis : grandioses, exceptionnels, sublimes, les paysages des Dolomites, et chaleureuse, aimable, cordiale, l’ambiance au sein de la petite communauté que nous avons formée. Pas le moindre incident sur la route et nulle bisbille à l’hôtel : une semaine parfaite. Ou presque parfaite : les deux points noirs, et la couleur s’impose dans les deux cas, ce furent les tunnels et les motards. J’y reviendrai. En attendant, amusons-nous à décrire les mœurs de la tribu VVV, avec un peu de recul et une pincée d’ironie, mais avec toute la sympathie que cette tribu inspire.

Ce qui avait déjà fait mon étonnement il y a deux ans (séjour en Ardèche et traversée des Alpes), c’est l’organisation qui préside aux parcours cyclistes et aux trajets en voiture, et plus précisément ces pique-niques volants qui sont d’un grand confort pour les valeureux rouleurs mais qui supposent en amont que de bonnes âmes se démènent pour les achats, les préparations, les déplacements et les rendez-vous. Le dévouement de Brigitte n’est un mystère pour personne, le zèle de notre cantinière en chef, qui fut assistée au mieux par la néophyte Dominique, et épisodiquement par la novice Édith. Que des dames, me direz-vous, comme c’est étrange… Heureusement que la dernière nommée est tout aussi cycliste que les messieurs, sinon on avait droit à un partage des tâches tout ce qu’il y a de traditionnel. On en fut tout de même très près. Moi qui fais la cuisine depuis toujours et quotidiennement, je redis que je m’étonne, pensant bêtement que ces grands sportifs qui ne sont plus des enfants pourraient se débrouiller par eux-mêmes, en se bourrant les poches de victuailles, ou en se faisant parfois un resto rapide, ou en se contentant d’un ravitaillement léger, qui ne réclame nulle préparation. Ou encore en se dévouant tour à tour pour prendre en charge les pique-niques volants… Horreur ! Provocation ! C’est si bon de rouler tous les jours et d’être gâtés par les dames, et si rassurant de penser qu’elles ne vivent bien que dans le dévouement. Certains prétendent, je l’entends d’ici, que cela se vérifie parfois… Allez savoir. N’empêche que quand les femmes se mettront sérieusement au vélo, et pourquoi pas au vélo à assistance électrique, il faudra bien que les machos pédaleurs se débrouillent tout seuls. Tremblez, camarades, finie la becquée !

Ce qui m’a également frappé à nouveau, c’est l’esprit de performance qui anime durablement les vieilles tiges. Avaler les kilomètres, et plus encore, dans le cas présent, empiler les mètres d’ascension, ajouter un passo à un autre passo, pimenter un 10% de pente par un petit coup de 15-16%, c’est le moins que puisse faire un VVV qui se respecte. En remettre, en rajouter, se gaver « d’options plus », c’est le programme minimum. Soyons clairs, il y a ceux pour qui en faire trop est à peine suffisant, et ceux pour qui en faire moins est déjà un peu trop. Une question de ressources inégales, de données physiologiques, et pas seulement de volonté. Une question aussi, parfois, de vision du vélo : ne pas rouler pour exercer sa force, pour faire un temps ou une place, mais pour le pur plaisir d’avancer, de s’élever, de s’imprégner du paysage, virage après virage, effort après effort. Il se peut qu’être doté de moyens modestes (comme c’est mon cas) favorise cette vision hédoniste du vélo : juste compensation, on est moins costaud et donc plus enclin à donner un sens autre que sportif à la pratique du pédalage. En montagne, c’est particulièrement gratifiant : on en bave parfois, ou souvent, mais on a tout son temps pour savourer, observer, incorporer l’indicible beauté des lieux. Pour moi, découvrir les Dolomites aura été un permanent exercice d’admiration. Au sommet des cols, dans telle ou telle vallée, j’aurais aimé prendre davantage encore le temps de l’émerveillement.

Il n’est pas aisé de trouver les mots pour saisir la beauté très particulière de ce massif montagneux. J’ai souvent eu l’impression de n’avoir rien vu de comparable, ni dans les Vosges, bien sûr, ni dans le Massif central, ni même dans les Alpes ou les Pyrénées. Le charme propre des Dolomites tient à la manière dont les pentes boisées ou herbues sont surmontées de hautes falaises rocheuses, nues, verticales, déchiquetées, crevassées, sur lesquelles la lumière se réfléchit en d’incessantes variations, à travers mille nuances, du blanc pur au gris bleuté. Ces falaises, ces hauts pans de pierres cristallines, ont le bon goût de s’offrir partout au regard, depuis le fond des vallées, à la faveur des ascensions ou des descentes, de même que dans la proximité des sommets. Depuis ces sommets, comble du bonheur, se découvrent de formidables panoramas, tout un étagement de parois hachurées, de grands cirques rocheux, de plongées vers les terres inférieures, d’élans vers la ligne brisée des plus hauts pics, où s’accrochent parfois des lambeaux de nuages translucides. Le jeu de la lumière et des ombres sur ces reliefs tourmentés parachève la splendeur des lieux. On parle parfois d’une « beauté à couper le souffle » : l’expression n’a jamais été mieux justifiée que pour des cyclistes s’ébrouant dans les Dolomites !

Venons-en à la confrérie des valeureux pédaleurs, les costauds et les modestes, les forçats et les dilettantes, les boulimiques et les sages. Ils m’ont épaté, je peux bien le confesser, les quatre « optionnaires » systématiques, ceux qui chaque jour ont opté pour le menu complet, col dur plus col très dur, au singulier ou au pluriel.

De la part de Bernard Simon, rien d’étonnant : lui, il est par excellence le Chasseur de cols, le cumulard de sommets, année après année il complète sa collection de trophées, il se fait prendre en photo sur les cîmes, il cherche davantage la nouveauté que la répétition (raison pour laquelle il s’est dispensé du passo San Pellegrino, du déjà-vu déjà-grimpé). Bernard le Montagnard pédale avec une calme conviction, sûr de lui mais sans esbroufe, convaincu que même quand la pente est raide, il passera, à sa main, sans se plaindre ni exulter. Il peut concéder que certains cols sont redoutables, comme le bien nommé passo Duran (le col dur dur) ou le Fedaia (le col des Fadas), mais il aime penser que beaucoup d’entre eux sont « faciles ». Facile, le Stelvio, par exemple ! Si j’avais su, je l’aurais monté les doigts dans le nez, celui-là ; avec Patrick, on s’était promis d’y « lâcher les chevaux », mais le problème est qu’on ne les a pas trouvés, les chevaux… « C’te connerie », qu’il dirait, le Nanard grimpeur, avec son air faussement bougon et sa gouaille réjouissante. Il ne faut pas s’y tromper, il est comme ça, « Oui-oui-non-non », il ne cache pas son jeu, mais c’est à nous d’en comprendre les règles. Ajoutons qu’il a alimenté avec talent quelques-unes des grosses rigolades qui ont agrémenté les repas du soir.

L’autre Verdunois, Alain Collinet, je le connaissais moins, j’avais pu pourtant apprécier déjà sa bonne humeur et son sens de l’organisation lors de la sortie VVV de Longuyon. Alain, qui a un sens du col inné (désolé), c’est la Puissance tranquille, il a de la force à revendre, il donne l’impression que ses réserves sont inépuisables (comme sa très appréciée mirabelle, la désormais célèbre collinette ?). Ce n’est pas qu’il cherche à en faire plus, mais en faire beaucoup lui est naturel, ce qui ne l’empêche pas de lever la tête, de prendre des photos au cours des ascensions, et même de guetter la bonne lumière. Il a la chance de pouvoir conjuguer la performance et le plaisir, l’effort sportif et la curiosité. Si l’on ajoute qu’il est terriblement sympathique, cela donne envie de lui tenir compagnie lors des ascensions… et c’est là que le bât blesse, il faut parvenir à le suivre, un privilège réservé à quelques-uns. Moi, c’est surtout quand j’étais sur le bord de la route, lors de mes jours de repos, que j’ai pu constater l’efficacité de son coup de pédale. Il a bien de l’allant, Alain. Et voici qu’on apprend qu’il a gagné une course à son retour des Dolomites ! À son âge… mais j’y pense, ce gaillard, c’était le jeunot de la bande, le junior, un gamin de 56 balais… tout s’explique. N’oublions pas non plus que ce grand bavard s’est infligé naguère un stage de 10 jours de silence : c’est donc un homme de défi, d’autant que tenir sa langue doit être beaucoup plus difficile que d’enfiler un passo après l’autre.

Parmi les privilégiés qui peuvent rouler dans la roue du gosse, il y a Dominique Perret, que j’avais surnommé le « Cabri des Alpes », son format modeste ne l’empêchant pas, au contraire, de sauter de col en col. Désormais, je le vois comme le « Ludion des Dolomites », vu que sans cesse il monte et il descend, sensible comme pas un à la pression de l’air et au rythme pression-dépression. Vous le mettez dans sa bulle, et invariablement il monte, descend, remonte et redescend, moulinant comme un damné. Une manière de mouvement perpétuel. Pour lui, une « journée normale » (je le cite), c’est une journée entière de vélo ; la demi-journée, c’est bon pour « les sportifs de salon » (je le cite encore) – moi, avec mes deux jours pleins de repos, je suis donc moins qu’un sportif de salon, une sorte de traîne-savate. Il n’en a jamais assez, le Ludion, sur un mode quasi intégriste : « on est là pour faire du vélo » (autre citation), et pas pour peigner la girafe ou s’extasier sur les paysages. Il m’étonne un peu, je le confesse. Je l’ai vu foncer tête baissée dans les premiers mètres de la descente du passo Sella, alors que le panorama qui s’offrait était plus sublime que jamais (je n’avais qu’une envie, faire une vraie pause, lever la tête, jouir de ce moment magique). Quel est le ressort de cette passion ? J’ai songé en l’observant à une formule inventée par l’un des écrivains dont j’ai beaucoup fréquenté les œuvres, Louis Aragon, formule destinée à rendre compte du « goût de l’absolu » : il est des hommes pour qui « rien n’est jamais assez quelque chose »… Ce n’est jamais suffisant, il faut recommencer, chercher au-delà, s’efforcer toujours, indéfiniment. Un col en cache toujours un autre. Remettez-moi un petit Falzarego (le col du falzar n’est pourtant pas une pantalonnade), et ajoutez-y une pincée de passo Valles (un peu moins dansant que le paso doble). C’est ainsi. À chacun son jeu, et « ludion » est de la même famille que ludique : de même qu’il faut imaginer Sisyphe heureux (disait Albert Camus), imaginons que le Ludion s’amuse à n’être jamais rassasié.

Le quatrième de la petite bande des optionnaires, c’est Bernard Guérard, dont j’ai eu plaisir à faire la connaissance. Un costaud, lui aussi, aussi fortiche que discret, et serviable (il s’est chargé du transport de ma bécane). Pas de forfanterie chez lui, une vraie humilité, puisqu’il a reconnu n’avoir rien gravi d’aussi dur que les Trois Cimes – le sommet à péage que nous n’avons pu, hélas, atteindre en voiture, Dominique N. et moi. Comme Alain, il se frise la moustache là où moi je me contente d’avancer, il avale l’asphalte comme moi la polenta, sans jamais frôler l’indigestion. Avec ses freins à disque, il assure autant en descente qu’en montée, et là aussi je suis condamné à voir s’éloigner sa roue arrière. Impressionnant, faut s’incliner. Compagnon d’Édith, il a aussi veillé à respecter la différence de leurs forces.

Parmi les sept autres acteurs, quelques-uns ont pris des portions d’option, et l’ont parfois regretté, je crois. Sûr qu’un grimpeur aussi talentueux que Francis Roch aurait pu prendre une plus grande part de ces options, mais manifestement il a préféré faire l’économie de ses forces et mieux profiter du séjour. Lui, il roule et il grimpe avec le sourire, son sens de l’humour ne le quitte pas, qu’il soit dans le dur des pentes ou dans le confort du jacuzzi. Un cycliste et un homme éminemment fréquentable. La preuve, c’est qu’il est fréquenté : le couple qu’il forme avec Jean-Michel Nicolas, le Toubib décoiffant, ne laisse pas d’étonner. Ce sont deux frères souvent parés de la même tunique, aux allures assez semblables, l’un plus émacié (un mixte de Don Quichotte et de Fausto Coppi), l’autre plus fort en torse (un peu Anquetil, fameux noceur, un brin Dalaï-Lama, cherchez l’erreur). En fait, je soupçonne le Toubib d’être un descendant de moine rabelaisien, alors que Francis Roc d’azur doit être né non dans les choux mais entre un pont et une chaussée. Ce sont là bons compagnons, « grands buveurs et vérolés très illustres » (disait maître François Rabelais), aussi forts sur la gaudriole que réservés sur la pédale (et qu’on ne me fasse pas dire ce que je n’ai pas dit). Aimer rire, c’est une grande qualité, et plus grande encore quand on est capable de rire de soi. Qu’ils soient remerciés d’avoir le plus souvent roulé avec les modestes.

Avant d’évoquer ces derniers, un mot sur le régional de l’étape, le Jean-Marie aux origines italiennes, le Salvestrin de la Péninsule. Lui, il est assez difficile de le suivre, puisque tantôt il musarde à l’arrière, et tantôt il fonce à l’avant. Son truc c’était de me demander, depuis quelque temps déjà, si j’étais « prêt pour les Dolomites » : à l’évidence, je l’étais, sous condition de ne pas commettre d’excès de vitesse et de prendre des jours de repos (un jour sur trois, pour être précis). Mais lui ? Inconstant, malgré l’impressionnante mallette de drogues diverses qu’il transporte avec lui. Difficile de trouver le bon dosage. De mêler les micro-doses et les compléments alimentaires. Parfois en pleine forme, parfois à la rue, le Mabuse des VVV, le singulier docteur Pansement. Il se reproche de n’avoir pas eu la sagesse des vétérans avisés, et on ne saurait lui donner tort. Il a eu tellement la trouille d’en terminer avec le Stelvio à la tombée de la nuit qu’il ne nous a pas attendus, le bougre, trop heureux de ne pas se faire rattraper par les cyclotouristes et les unijambistes. On lui pardonnera de penser parfois à lui-même plutôt qu’aux autres, puisqu’il sait aussi se montrer rouleur solidaire et joyeux convive.

Mon compagnon de bonne et de moins bonne fortune, ce fut, comme en Lorraine, le discret Patrick Nicolas, dit « Patou des Corbières », un bon randonneur qui jamais ne se la pète, dur au mal, obstiné, boulimique parfois (il a roulé tous les jours, lui) ; un ami avec lequel il est permis de parler d’autre chose que de vélo, même quand nous le chevauchons de conserve, le vélo, et qu’on se plaît à évoquer l’air du temps. On aime rouler à notre rythme et échanger, tranquilles, sereins, ou à la peine. On aurait aimé franchir la ligne ensemble en haut du Stelvio, on y a presque réussi, mais lui ne pouvait accélérer dans le dernier kilomètre, et moi je ne pouvais baisser de rythme de crainte de perdre l’équilibre. Le Patou, il s’est également régalé de paysages, de variations lumineuses, de perspectives grandioses ; il n’aime pas le vélo que pour le vélo. Il a eu la chance, en outre, d’être bichonné par Dominique, son épouse très attentionnée. Une forme de dopage conjugal, tout à fait licite, et enviable. Mais un tracas que nous partageons tous les deux (je parle de Patrick), c’est celui du mauvais sommeil. C’est fou ce dont nous aurions été capables si Morphée nous avait bercés toutes les nuits ! On aurait mis la misère aux cadors, on aurait eu la niaque et la sève, la selva di Cadore.

Un mot sur notre unique cycliste féminine, Édith Angel, le bon ange des Dolomites, que je ne connaissais pas du tout : jamais pressée, Édith, mais terriblement obstinée et efficace, capable de gravir les pires raidards, les cols interminables et pentus, calmement, à son rythme, en toute simplicité. Il est clair qu’Édith n’est pas dupe des exploits dont se vantent les garçons, de leur propension à se comparer, et à se tirer la bourre. Elle sait qu’il y a là une forme de vanité, et elle préfère en sourire. Je crois savoir qu’elle fait des expériences de laboratoire sur le cerveau des rats : nul doute que cela doit lui servir pour observer les agissements de l’espèce pédalante. Pour ne pas les faire trop attendre, les cyclistes mâles, elle a eu la délicatesse de souvent partir avant l’heure. Mais j’ai pu me rendre compte que la rattraper n’était pas une mince affaire. On aurait pu, à l’arrière, faire la route ensemble. Si son exemple pouvait faire des émules, je serais le premier à m’en réjouir. Les dames sont si rares parmi les VVV, n’est-ce pas Élisabeth ? Une ambiance un peu moins macho, un peu moins bravache, je suis preneur.

Que dire, enfin, de l’inusable Gérard Regrigny, le vénérable doyen (74 ans), le grand organisateur ? Et que lui dire à lui sinon merci ? Avant toute chose, merci. Merci de nous avoir fait découvrir ces prodigieuses Dolomites, et d’avoir réglé par le menu le programme des randonnées, en veillant à satisfaire chacun, les costauds preneurs d’options et les escaladeurs moins téméraires. Il est probable que sans son initiative plusieurs d’entre nous seraient passés à côté de quelque chose de grand. Quant à Gégé cycliste, il n’en finit pas de me surprendre : quand je le sens en difficulté, que je l’entends ahaner, gémir et s’encourager, la pensée m’effleure qu’il va mettre pied à terre, qu’il va se montrer raisonnable. Et j’en suis pour mes frais. Gégé ne renonce jamais, et quand il annonce qu’il s’arrêtera avant le sommet dans la montée des Trois Cimes, que croyez-vous qu’il fasse sinon se hisser jusqu’en haut ? J’en viens à douter qu’il soit parfois fatigué, sa résistance est un mystère. Gérard est un homme de défi, il se peut que chaque jour il se lance à lui-même un pari, et que perdre un pari n’entre pas dans son vocabulaire. Il m’arrive de penser qu’il en fait trop, et qu’il sous-estime la difficulté, sinon pour lui-même, du moins pour ceux qui participent aux sorties des VVV. À ce sujet, on s’en tous bien tirés, mais que la journée du retour fut lourde et fatigante ! Gravir le Stelvio à vélo entre deux longs trajets en voiture, c’était une pure folie. Certes faisable, puisqu’on l’a fait. Mais raisonnable, non. « Raisonnable » ne fait pas non plus partie du vocabulaire de notre grand Gégé. Mais qui sait, l’âge venant …

Je ne peux pas conclure, même si ce petit mot est déjà fort long (j’en vois plusieurs qui ont décroché depuis longtemps), sans revenir sur les deux points noirs mentionnés plus haut, les tunnels et les motards. Le premier tunnel, celui de Cencenighe, a été une horreur. Je ne comprends toujours pas pourquoi personne n’en avait mentionné l’existence ni le danger : informés, nous aurions pu ôter nos lunettes de soleil (c’était bien le moins), prévoir de l’éclairage à l’avant et à l’arrière du groupe, des bandes fluo pour être un tant soit peu visibles, et affronter le Moloch en connaissance de cause. Se mouvoir dans une quasi-obscurité et un vacarme plus qu’assourdissant, être frôlés par les voitures, prendre garde à ne pas heurter le trottoir sur notre droite, tout cela a généré un stress intense chez chacun d’entre nous (quelqu’un prétend le contraire ?). Et on ne m’ôtera pas de l’idée que nous nous sommes mis en danger. À défaut de pouvoir les éviter, les tunnels, on peut s’y préparer. Avec celui de Caprile, pourtant bien plus court, et dans le sens descendant, j’ai pu mesurer le degré de perturbation sensorielle que le noir et le vacarme peuvent produire : j’ai failli percuter Gérard, qui allait de droite et de gauche et qui a dû s’arrêter brutalement, tandis que moi-même je me sentais complètement désorienté. D’autres ont témoigné du même phénomène.

Quant aux motards, si je ne me retenais pas, ce serait un massacre. Je me contenterai de dire que ma détestation de l’espèce pétaradante s’est richement nourrie… Je n’éprouve aucune indulgence envers les gras du bide bardés de cuir, les sacs à bière casqués et bottés, les fauteurs de bruits cauchemardesques, la horde sauvage des pollueurs. Autant le vélo est doux, fraternel, pacifique, autant la moto est barbare, agressive et primaire. Il ne leur suffit pas d’être là, à nous gâcher le plaisir et à faire injure au silence, il faut aussi qu’ils nous frôlent, les nouveaux barbares, qu’ils remettent les gaz quand ils nous dépassent, qu’ils nous terrorisent à force de nous mettre la pression. Les salopards, ils ne nous lâchent pas, ils nous font trembler, ils piétinent la beauté, ils sont lourds, ils insistent, leur présence est en soi une forme d’arrogance, ils piétinent nos plates-bandes, ils nous envahissent, ils sont partout… Pour un peu, ils me rendraient parano, et ils me dissuaderaient de revenir un jour dans les Dolomites. Mais ce serait donner raison aux terroristes. Militons, camarades, pour leur interdire certains jours de la semaine, pour leur imposer des silencieux, pour promouvoir le solex et le vélo électrique !

Alain, excuse-moi, toi qui m’as dit céder parfois aux joies de la moto, il fallait que ça sorte. Et puis, je ne te crois pas, toi, tu es un cycliste émérite, un vrai, tout le contraire d’un barbare.

Comme vous avez tous et toutes contribué à la réussite de ce mémorable séjour, je termine en remerciant chacun de la part qu’il ou elle y a prise, et pour son indulgence envers le rédacteur de ce compte rendu.

Un 14 juillet bien arrosé

Ce n’est pas tous les jours qu’on atteint l’âge canonique de 70 ans : j’ai donc tenu à fêter ce matin mon 70ème anniversaire sur le vélo, histoire de ne pas prendre un trop gros coup de vieux. Et je comptais sur une présence massive de mes petits camarades pour m’aider à passer le cap du grand âge. Hélas… Le risque de pluie vous en aurait-il dissuadé ? Avez-vous préféré, bande de pantouflards, regarder le défilé à la télévision ?

Heureusement, qu’ils en soient remerciés, il y avait 4 valeureux Randos (plus l’inconnu de Dinard) pour arroser dignement ce 14 juillet cycliste : Gaby, Pierre V., Marco et Stéphane (le jeunot, qui ose n’avoir que la moitié de mon âge). Grâce à eux, et grâce à la pluie (il est vrai), j’ai bénéficié d’un anniversaire bien arrosé (avant même le champagne qui m’attendait au retour). Car très arrosés nous fûmes, on ne va pas vous le cacher, entre bruine légère et bonne pluie d’été bien drue. Sans discontinuer, qu’elle est tombée, la pluie, sauf dans le dernier quart d’heure, pas tout à fait de quoi rentrer secs à la maison.

Mais ni crevaison, ni problème, tout a baigné dans l’eau douce. Un parcours plutôt plat, une allure soutenue, une étrange euphorie… les plaisirs de l’eau, c’est aussi à vélo qu’on les goûte. Pourquoi rester dans sa tanière quand la route se fait rivière, je vous le demande ?

La mousson d’automne (25 septembre)

Première sortie d’automne, dernière grande sortie avec départ à 8h ; dès la semaine prochaine on passe à 8h30, les jours raccourcissent et nos parcours aussi. Mais pour moi ce sera parcours zéro dimanche prochain, car je causerai littérature du côté de l’abbaye de Seuilly, sur les terres du grand François Rabelais – dont au passage je vous livre cette pensée toujours actuelle :
« Ami, vous noterez que par le monde y a beaucoup plus de couillons que d’hommes, et de ce vous souvienne. »

Une bonne pensée au passage pour le moine rabelaisien des Dolomites, alias le Toubib décoiffant.
A dire vrai, on ne s’aperçoit guère que l’automne est venu tant la douceur perdure, et la lumière. Certes, un peu frisquet au départ, mais si agréable ensuite, pour les 20 pédaleurs du jour, dont, et c’est un petit événement pour notre bien vieux club, un amateur d’à peine 18 ans qui souhaite ne plus rouler seul (il a déjà l’expérience d’un club FFCT). Le jeune Guillaume Gebel s’est, ma foi, très bien adapté, même si sur la fin il était tout à fait rincé (sa distance habituelle, c’est plutôt 80 km). La semaine prochaine, ou la suivante, nous accueillerons un autre jeune homme, Juan Lasso, 27 ans. Avec Stéphane, Jérôme et son « frère », l’autre Guillaume, le club a donc bien entamé une cure de rajeunissement. Je dis bien : « le club ».

Le grand moment de la sortie, ce fut non seulement l’ascension de la Butte de Mousson, mais le fait d’avoir poursuivi l’effort jusqu’aux ruines de l’ancien château. Une idée d’Amico, qui fit l’unanimité, du moins chez ceux qui s’étaient hissés jusqu’au village. Quatre y avaient renoncé, hélas pour eux (mais, que voulez-vous, « les invités », les « faut que je sois rentré de bonne heure »), et un cinquième (l’homme de Dinard) dut rebrousser chemin, faute de disposer d’un développement approprié à la rude, à l’infernale grimpette de Mousson. Autant cette pente est rébarbative, hostile (et mal goudronnée, qui plus est), autant le panorama qui se découvre tout au sommet mérite absolument le détour (et il n’y a que du 12% maxi sur la fin, contre les 17-18% de la Butte, ce qui est presque reposant). Il n’y a pas de meilleur endroit pour admirer les vallées de la Seille et de la Moselle, et le site de Pont-à-Mousson dans son entier. Je propose qu’on y repasse l’an prochain, par beau temps, mais de préférence en montant par le côté Lesménil, ce sera moins dissuasif.

Je sais, certains seraient frustrés : le truc, le hochet, le titre de gloire, c’est de monter de gros raidards, ou des cols bien longs, bien durs. Et de pouvoir ensuite en parler. De même que le Ventoux fait le vantard, la Mousson fait mousser.

L’ancien château de Mousson, bâti au Moyen âge, résume une page d’histoire universelle : symbole de résistance au pouvoir central, en une époque où la Lorraine n’est pas encore française, il fut démoli sur l’ordre de Louis XIII et de Richelieu, en même temps que d’autres châteaux de la région et que les fortifications de Nancy … une forme de terrorisme d’État. Rien que de très banal. A partir des quelques ruines qui subsistent, il nous reste à imaginer la splendeur de la construction sur cette hauteur.

Un dernier mot : à l’avant, quand personne ne fait office de capitaine de route, quand personne ne prend sur lui de réguler le tempo, c’est un peu la foire… ça va vite, ça attend, ça repart sec, ça attend à nouveau. Et peu importe que, comme aujourd’hui, le retour s’effectue contre le vent. Ce serait si simple et tellement plus confortable de s’y prendre autrement … Mais je sais, le mal est sans remède. A moins que de bonnes âmes se mettent un jour, et tour à tour, à jouer les capitaines de route avisés ?

La petite Meusienne (27 septembre)

Sortie post-VVV du 27 septembre (Void-Baudrémont-Void) :

Ils sont venus nombreux, les habitués des sorties VVV, 20 d’entre eux ont répondu à l’appel : une paisible promenade meusienne, dans la douceur d’un été qui n’en finit pas, sur des petites routes charmantes, en bon état, sans voitures, ça ne se refuse pas. Ils le savaient, les amateurs de grimpettes, les boulimiques du dénivelé, pour ce qui est du relief, elle est modeste, la plaine meusienne, elle ne se pousse pas du col, sa beauté est sans prétentions : le plaisir serait donc ailleurs. Et le plaisir fut au rendez-vous, à en juger par les commentaires de chacun. Ce n’est pas notre « hédoniste » patenté qui me démentira, n’est-ce pas Marc, puisque c’est désormais écrit sur ton vélo. L’idée, en proposant cette sortie à la grande confrérie, c’était de faire profiter les copains d’une balade qu’on avait faite en petit comité et dont on avait un excellent souvenir.

Nombreux, donc, les MPR (les Mordus de la Petite Reine), le plus souvent venus en couple : les inséparables Francis et Jean-Michel (le Toubib rabelaisien et le Cantonnier avisé), Claude et Amico (le Brasseur blagueur et l’Italo-lorrain, dit Coco-la-Plaque), les Verdunois Alain et Bernard (les Vikings ailés), Marc l’hédoniste et Elisabeth la vaillante (supporter un peloton de gros machos, quel mérite !), Gaby GPS et Christian W., les deux gloires de Lay-saint-Christophe, le GO Gégé et le Chti Jean-Claude (Huret), Jacques L’Afond-la-Caisse et Jean-Claude B. (il boit le bouillon quand Jack relance) ; autant de couples auxquels s’ajoutent les deux « Autres », l’autre Gérard (Conraux) et l’autre Italien (Jean-Marie S., le fameux docteur Cetavlon), et aussi Jacques Pierrat l’électro-vététiste et Philippe Schutz le barman de Baudrémont, sans oublier les randonneurs associés, Patou des Corbières et moi-même (pour le sobriquet, ce n’est pas à moi d’en décider).

Bref, que du beau monde. Et plein de gros costauds, qui ont modéré leurs ardeurs, le plus souvent. Nanard le Montagnard a même obtenu, « c’te connerie », qu’on monte ensemble la dernière bosse avant le repas : un vrai événement, mine de rien, un exploit remarquable, une exception mémorable ! Pourvu qu’ils s’en souviennent, les VVV Voraces qui, d’ordinaire, s’empiffrent de grimpettes à Vitesse grand V. Ils ont quand même pu s’exprimer, les Véloces, les Féroces, dans la douzaine de côtes de notre paisible balade. Et puis, faute de cols et de raidards, il y avait les pancartes : quelle orgie, quelle goinfrade, fallait  les voir se tirer la bourre, même le pacifique Patou y est allé de son sprint. Je ne l’ai pas vu, on m’a raconté, moi je musardais à l’arrière dans les derniers kilomètres : voilà bien un autre rituel de l’étrange tribu des VVV, rentrer le plus vite possible quand ça sent l’écurie, terminer en trombe, se faire péter le cardio, se dézinguer les guiboles, s’exploser les cuissots, se déchirer le cuissard… Alors que c’est si agréable de terminer en moulinant, en se délassant, tout au plaisir de conclure en se frisant la moustache. D’ailleurs, accélérer le rythme à ce point pour conclure, c’est peu courtois et très contestable…

Ceci dit, tout hédoniste que je suis (on est donc au moins deux), je comprends bien que les costauds encore plein de sève (la selva di cadore, comme on dit dans les Dolomites) trouvent leur plaisir dans la dépense de leurs forces, et que les vieilles tiges, angoissées par le grand âge qui les guette, aient besoin de se remonter le moral en se déboîtant la carcasse. Mais comme nécessité fait loi, un jour sages ils deviendront.

Et joyeux compagnons ils sont déjà, ce qui ajoute considérablement à la qualité de ces sorties fort amicales. Y compris pendant le temps du repas, de tout le repas, Mister Jack…

Le mot du jour (Claude P.) : « La différence entre Gégé et Reynald, c’est que Gégé nous fait grimper là où Reynald nous fait descendre » (exemple : la côte d’Ailly – à la vérité, j’avais pensé que du 13% c’était encore bien peu pour un VVV moyen, et presque insultant, à côté d’un bon petit 18%).

Rien à prouver, tout à éprouver, ce pourrait être ma devise.

Coup de froid, coup de jeune (9 octobre)

Quel contraste, mes amis ! Après une très longue période de beau temps, un été qui ne voulait pas finir, le basculement est spectaculaire : un petit 6° au départ, en ville, et un peu moins dans la campagne ; tenue d’hiver de rigueur pour les 14 courageux du jour, sauf pour Stéphane, jambes à l’air comme si de rien n’était. D’autres, manifestement, ont dû craindre les premiers frimas et se sont abstenus. Dommage, le parcours, souvent roulant, parfois gentiment vallonné, n’était pas désagréable. Après Bayon surtout, il empruntait des petites routes sinueuses et bien propres à réchauffer les organismes. On y a retrouvé les deux éclaireurs du jour, Jean-Marie B. et Jean-Claude C. Ce qui a porté à 16, tout de même, le nombre de pédaleurs sur la route : pour une première sortie quasi-hivernale, ce n’est pas si mal. La vérité est que le petit coup de froid du jour fut très supportable, et si quelques gouttes de pluie sont tombées en fin de matinée, ce ne fut qu’une pissée de moineau.

Au nombre des 16, un nouvel invité, Nicolas, un ami de Guillaume Gebel (le benjamin du peloton, revenu en 3e semaine), et à peine plus âgé que lui. Il a une vraie morphologie de grimpeur, ce Nicolas, ce qui tombe bien, puisqu’étudiant à Mulhouse, il a fait des ballons vosgiens son terrain de jeu. C’est dire que le peloton des Randos avait une nouvelle fois pris un coup de jeune, et qu’il a fallu s’organiser pour réguler l’allure. Après un départ un peu trop canon, Nono et Gaby ont joué les capitaines de route avec succès, chacun a pu suivre, ou revenir sans trop de peine une fois passées les plus longues côtes. Ou non sans peine, me souffle Olivier, qui eut du mal à trouver la bonne carburation. Disons qu’il se confirme qu’il va falloir trouver de nouvelles solutions pour gérer au mieux la disproportion des forces. Que le club rajeunisse est une excellente chose, qu’il faille s’organiser en conséquence est devenu une nécessité.

Un peu d’histoire : Bayon a été une belle cité fortifiée, implantée entre la Moselle et l’Euron ; elle a subi les invasions barbares, en particulier hongroises (des ancêtres d’un certain Sarko, probablement), et fut, elle aussi, en partie détruite sous le règne de Louis XIII, pour cause de non-allégeance au royaume de France. Les tableaux peints par Jean-Baptiste Claudot vers 1800 (voir pj) donnent encore une idée de sa calme beauté d’antan. C’était avant l’âge du béton, du bitume et de l’automobile. Pour un peu, on en aurait la nostalgie.

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Le coup du chevreuil (16 octobre)

Brouillard et fraîcheur au départ, franc soleil ensuite, pour une bien agréable sortie d’automne, tantôt très roulante, tantôt vallonnée. La jeune garde est là, le lycéen Guillaume, l’étudiant Nicolas (qui n’est pas l’ami du précédent, je corrige, mais son oncle, du haut de ses 20 ans), Jérôme, Stéphane, et aussi Romain, le fils de Jean-Michel … si bien que notre petit Pierre, ex-benjamin du groupe, réalise qu’il vient de basculer dans les seniors, et que les plus âgés se consolent en se réjouissant d’être là, tout simplement, en bonne santé, toujours vaillants, à commencer par le vénérable Gégé, de retour d’un séjour méditerranéen riche en kilomètres parcourus et en grimpettes avalées.

Seize nous sommes d’abord, avant d’être rejoints par trois unités errantes, ce qui fait 19, et même 20 si l’on compte l’éternel éclaireur aperçu en fin de balade (le très solitaire Jean-Yves). Consigne est donnée aux gros rouleurs de veiller à la cohésion du peloton, Marco et Gaby se dévouent pour jouer les capitaines de route, et le dispositif fonctionne plutôt bien jusqu’à la pause de Pulligny. Ensuite, l’accord se fait pour que la côte de Ceintrey opère la séparation en deux groupes. Devant, on roule ensemble, les côtes qui suivent ne creusent que de petits écarts, et on décide d’un petit détour par le fameux col du Minet, histoire d’ajouter quelques efforts et de ne pas rentrer trop tôt.

Mais ce n’est ni ce col ni ce minet qui auront effrayé le peloton : c’est, à proximité de Pierreville, un chevreuil traqué par des chasseurs (on venait d’entendre des coups de fusil), déboulant à toute vitesse, frôlant les roues de ceux qui roulaient à l’avant, et passant à deux doigts d’une voiture qui arrivait en sens inverse. Une brève rencontre, qui ne fut pas « renversante », heureusement. Mais mieux vaut col du Minet que coup du Chevreuil. Le premier vous fait monter, le second peut vous faire descendre.

Passant par Benney, on a eu une bonne pensée pour Cyrille, le fils de Jean-Luc et de Chantal, après son malheureux accident. Une autre bonne pensée avait été adressée lors du départ à Joseph, convalescent, mais dont Yves nous a donné des nouvelles plutôt rassurantes, et de même s’agissant de Georges, notre très apprécié doyen, qui a pu remonter sur son vélo.

Un mot encore : je viens de regarder le dernier tour de circuit du championnat du monde sur route, disputé dans le désert, et plus précisément pour ce qui est du circuit, sur une île artificielle, elle aussi déserte : ils ont eu de la chance, les coureurs, pas un seul spectateur pour les gêner ! Une idée vraiment géniale : du sport à huis clos dans le désert. Qu’est-ce qu’on attend pour attribuer les Jeux Olympiques au Quatar ? Les jeux universels du Pétro-Dollar, ça aurait le mérite d’être clair. Des mauvaises langues prétendent qu’un prochain Mondial de foot s’y déroulera, au Quatar… Dites-moi que c’est un canular, un cas nullard, une grosse Quata !

L’hiver avant l’heure (23 octobre)

Il se confirme que la transition entre l’été et l’hiver se fait attendre : température à peine positive au départ, des prés couverts de givre, des mains et des pieds bien glacés. L’hiver avant l’heure. Bref, il faisait froid, et les plus frileux se sont abstenus. Amico par exemple, la faute à son métabolisme d’Italien du sud ; Noël, dit Nono, parce qu’étant né dans une crèche bien chauffée, le froid est pour lui un calvaire ; le président et ses fidèles gardiens, principe de précaution oblige (on ne met pas en danger l’état-major du club) ; Jérôme, Guillaume G., Stéphane, et pas mal d’autres pour cause de vacances au soleil… Ils diront que j’invente, que je fabule, qu’ils avaient de bonnes raisons de s’abstenir : ne les croyez pas, le chroniqueur dit toujours la vérité.

Des pas frileux, il y en avait dix-sept au départ, puis quinze sur le parcours complet, Elektrik Jack ayant mieux à faire que de se geler longuement les batteries, et Gégé le Doyen étant tenu d’écouter ses bronches dès que le froid revient (mais on le reverra sur la fin, qui avait surmonté sa gêne respiratoire). Aux habitués s’était joint un petit nouveau, qui m’avait contacté la veille : Pascal Charpentier, qui vient de quitter la Bourgogne pour la Lorraine, un amateur de triathlon, pas mécontent de trouver un groupe pour ce qui est de la partie vélo de son sport. Mais s’il y a des amateurs de course à pied (Michel, par exemple) ou de natation (Gaby ?) pour faire équipe, qu’ils se déclarent. Attention tout de même, le gaillard bourguignon me semble bien affûté, et si son crawl et sa foulée sont aussi efficaces que son coup de pédale, ils vont ramer, les prétendants.

La solution étant de rouler bon train pour se réchauffer quand la congélation menace, le peloton a évité de lanterner, sans excès toutefois, histoire de ne pas larguer tout à fait les handicapés du jour, à commencer par le Patou de retour de ses Corbières chéries. Il avait manifestement abusé du cassoulet et du pinard local. Faut dire qu’il avait aussi dépensé une partie de ses forces avec les forçats du samedi matin (ceux qui depuis un demi-siècle font et refont inlassablement le même parcours la tête dans le guidon – cherchez l’erreur). C’est à noter, avant la dispersion habituelle de la toute fin de sortie, on a réussi en rouler en groupe avant comme après la pause. Un seul groupe. Philippe, Jean-Marie (le pharmacien de Vence) et autres mauvais esprits, révisez vos idées fausses, venez retrouver la chaude ambiance du club, au lieu d’aller vous commettre avec des pédaleurs à peine recommandables.

Vous aurez noté que dimanche prochain vous serez passés à l’heure d’hiver, pour peu que vous ayez songé à tripoter vos horloges et vos montres. C’est-à-dire ? Souvenez-vous : en octob-re on re-tarde d’une heure les instruments (alors qu’en av-ril on les av-ance). Donc, si vous voulez profiter d’une heure de sommeil en plus et ne pas arriver une heure trop tôt au rendez-vous, faites le nécessaire.
Espérons qu’on aura l’heure d’hiver sans l’hiver, même si aujourd’hui l’automne s’est faite discrète. Encore que le soleil se soit assez vite montré et que l’on n’a pas eu froid bien longtemps. Ce qu’on aura subi, ce n’est jamais qu’un leurre d’hiver. Que les frileux et les vacanciers se le disent !

Sorties des 30 octobre et 1er novembre :
Des lecteurs frustrés m’ont dit leur déception de n’avoir pas eu leur très attendu compte rendu dominical : me voici tenu de raconter à présent deux choses à la fois. Je pourrais tenter une synthèse, mais on n’y comprendrait rien. Une rapide comparaison tout de même : 14 participants dimanche, 12 aujourd’hui, dont 8 récidivistes, il me semble : Marc, Jean-Claude, Gaby, Gégé, Guillaume (Losfeld), Marcel, Patrick et moi-même, 8 valeureux qui avaient savouré le grand soleil d’avant-hier et qui n’ont pas craint la brume tenace de ce matin. Dans les deux cas, on a presque réussi à rouler tous ensemble d’un bout à l’autre. Presque.

Dimanche, les droitiers ont pris à droite à Ormes-la-ville au lieu de prendre à gauche pour Crantenoy, comme le prescrivait le parcours, et comme indiqué sur la pancarte : mais lire une pancarte, mémoriser le parcours et tourner à bon escient, il faut croire que ça fait beaucoup. Donc, long moment de flottement, nous ne sommes que trois (Franck, Patrick et moi) à profiter de la très charmante petite route qui monte vers Crantenoy, puis de celle qui descend sur Haroué, et qui offre une vue plongeante sur le château. Dommage pour les droitistes écervelés, qui finiront par comprendre leur erreur. Un premier regroupement (avec les rouleurs) du côté de Tantonville, un second (avec les promeneurs) avant la pause de Laloeuf, et voici le peloton reconstitué.

Ou presque, puisque manquent à l’appel Jean-Claude et Amico, Eric et Olivier : ces deux-ci, on les reverra, mais pas ces deux-là, pour des raisons que la raison ne peut connaître. Quant à Gégé, on sait que pour lui « le parcours, c’est sacré » : mais, à l’usage, ce que l’on comprend c’est ce que c’est son parcours qui est sacré. Rebelote aujourd’hui, un petit tour et puis s’en va. Mais personne ne le lui reprochera, le temps froid et lui ne sont pas bons amis. Et le côté sympathique de l’affaire, c’est qu’il tient à participer aux sorties du club.
Pour ce qui est de la fin de la balade, on aurait pu rester groupés, on a bien failli y réussir… mais le vent qui souffle de face, le tempo qui n’en fait qu’à sa tête, que voulez-vous, il y a des impondérables.

Ce matin, ce bon vieux tempo fut le plus souvent supportable pour tout le monde, et quelquefois un peu moins, dans le long toboggan qui mène vers Ochey, dans la rude côte de Thuilley. Mais, faute de se prélasser au soleil, on a plutôt bien préservé la chaleur du petit peloton. On a ainsi inauguré la longue série des brèves sorties d’hiver, avec départ à 9h. Des sorties d’entretien (en théorie), sans prétention autre que d’éviter les dangers de la saison : on se relâche et on s’empâte, on engraisse et on régresse.
Allez, on tiendra bon, par tous les saints du paradis (diront les uns), par tous les valeureux

Un revenant (6 novembre)

Le scribe m’avait dit : pourquoi que tu ramènerais pas ta fraise chez les Stroumpfs à pédales, histoire de renouer avec tes aminches et de voir la trombine des jeunes pousses ? Ben oui, pourquoi pas, que je lui ai fait. Alors, rendez-vous à Marcel Picot, chez les footeux (des footeux de première, soit dit en passant, des gaillards durs au mal, faut voir ce qu’ils sont capables d’encaisser). C’est donc un revenant qui va vous mouliner la bafouille du jour.

Malgré la menace de flotte, y’ avait foule, une bonne vingtaine d’obsédés du dérailleur. Les habitués, et aussi le grand Max qui faisait son retour, grenouille au vent, comme d’hab’. Et des nouveaux, Guillaume, un gamin d’à peine 18 piges, Jérôme le rouge (c’est de sa tunique que j’ cause, pas de ses idées, au cas qu’il en aurait), Pascal Le Charpenté (pas sûr d’avoir bien saisi son patronyme), Steph’ le Mitard (je vous demande un peu), Olivier Le Paroissien… Du sang neuf, même qu’il manquait un Nicolas et un autre Guillaume, des jeunots qui ne donnent pas leur part au chien, à ce qu’il paraît. Bref, font une cure de jouvence, mes vieux potes… enfin, vous me comprenez, les vieux, ils vieillissent quand même, c’est le peloton qui rajeunit. De retour, c’était le cas aussi de l’ami Pierrot, après plus de deux mois d’arrêt rapport à un dos en vrac. La poisse, mais bien content de frétiller à nouveau des manivelles.

De la flotte, on a eu un peu, quelques gouttes au début, rien de méchant, même si le Mousse, à peine humide, il manigançait déjà de rentrer à Bouxières… un mousse qui craint l’eau, entre nous, c’est pas banal. La vérité c’est qu’à peine mouillés on était secs. Et même très secs pour quelques-uns dès que ça grimpait. Sont pas tous des papillons ou des gazelles, les Randos, ou alors c’est que certains confondent le frein et l’accélérateur à l’approche des hauteurs, la trouille de manquer d’oxygène, probable. Ce matin, au-dessus de 300 mètres, ça piochait dur. Mais les Randos sont sympas, ils attendent les gaziers en déroute, ils laissent une chance aux traînards. Solidaires avec les pas solides ! Alors, comme ça, on était encore un bon paquet lors de la pause du cimetière – oui, n’ont pas changé sur ce point, une vraie manie, « on se reverra au cimetière » qu’ils disent… pour sûr qu’on s’y reverra, mais c’est peut-être pas la peine de s’entraîner, ça se fera tout seul, rien ne presse.

Après la pause de Luxure (de Lixières ?), une fois les outils remballés, on se cogne le vent dans la poire et des faux-plats pas plats pour un rond. C’est la fête au lactique qui monte dans les guibolles et au moral qui descend dans les chaussettes… Alors, forcément, y a des solidaires qui manquent d’air, et des écarts qui se creusent. A l’arrière, ils n’en ont rien à secouer, vu que « les derniers seront les premiers », comme il l’a dit, le natif de Nazareth (Yeshoua Ben Youssef, de son vrai nom ; si vous me croyez pas, adressez-vous à son père).
Mézigue, sur la fin, je surveille mon palpitant, je ralentis, je précautionne. Faut dire qu’avec ma vieille bécane, 20 ans d’âge, une antiquité que j’avais ressortie pour l’occasion, et qui pèse son poids, ça nous faisait 90 balais à nous deux. Un record. Et si je prétends à un petit coup de reviens-y chez les randos pédaleurs, faut que je me ménage, l’hiver sera long, on a bien le temps, avant d’aller faire les zazous dans les zigzags voziens (mais promis, on y retournera, en montagne : je me suis laissé dire que le scribe, le toubib et le cantonnier allaient s’occuper de l’affaire).
Allez, à la revoyure !

PS : vous avez le bonjour du scribe, qui me dit de vous rappeler qu’il y a des élections prochainement (au bureau du club) et qu’il faudrait bien que quelques-uns s’y collent : c’est pas le tout de pédaler, faut se dévouer ! Faut candidater ! Faut mettre des huiles dans les rouages (ça, c’est flatteur, ça devrait vous décider) !

L’usurpateur (11 novembre)

J’ai repiqué au truc, j’ai chopé le virus, because le scribe qui m’a fait une réclame d’enfer sur les bienfaits du pédalage en plein air (à ne pas confondre avec l’exercice en salle, où plus que tu pédales et plus que t’avances pas, un vrai truc de dingues en plus que ça schlingue la sueur que c’est à tomber). Bref, je suis remonté sur mon biclou, pas d’armistice pour les braves, que je me suis dit, et tant pis si je prends une rincée (faut dire que miss Météo, elle était pas jouasse), qui roulera verra ! De fait, on n’a pas pris une goutte sur la tronche. Et comme le scribe est un peu fatigué, je vais à nouveau usurper la fonction, c’est moi que je vais vous causer de la rando.

Au rancart, il y avait là une dizaine d’affiliés, des vieux loups de mer et des jeunots de trente berges, mais aussi une petite bande de branquignoles tout contents de venir rouler avec des as du guidon. On a vu tout de suite que c’étaient pas des pros vu que l’un deux a trouvé le moyen de crever avant même d’enfourcher sa machine ! Et vu qu’ils ont mis un bon quart d’heure pour changer la chambre et trouver le procédé qui permet de la gonfler. Comme tontons gonfleurs, y a mieux, mais comme mectons gonflants, sont champions !

Ceci dit, j’ai pu jacter avec les gaziers, et m’est avis qu’ils sont plutôt sympas, dans l’ensemble. Ils disent qu’ils sont des « vévévés », avec un petit air mystérieux, j’ai rien pigé, mais j’ai pas insisté. Probable que c’est une secte d’illuminés de la pédale, un peu berzingues mais inoffensifs. On m’a dit que que l’un d’eux était un toubib du genre rabelaisien, qu’un autre était un ancien brasseur chasseur de pancartes, un autre encore un sophiste de première qui adore faire le Jacques. Un peu baroque comme compagnie, mais franchement il y a pire. C’est pas les Amerloques qui me diront le contraire, avec ce qu’ils viennent de se ramasser (vont pas rigoler longtemps, les trumpistes à casquette rouge, ils n’auront ni le beurre, ni l’argent du beurre, mais la gueule de bois, ça c’est tout vu).

Sinon, sachez bonnes gens qui restâtes au coin du feu, que le Pierrot est revenu, qu’il a fait un bout de chemin avec nous, histoire de refaire du muscle ; et le batracien aussi qui, lui, tient déjà une forme d’enfer, fallait le voir se secouer la carcasse, un vrai démon. Sachez encore que Gégé-la-saulxure, on l’a croisé, ce qui laisse penser qu’il faisait le parcours dans l’autre sens : faut en conclure que son fameux « le parcours c’est sacré » ça vaut dans un sens comme dans l’autre. Cherchez pas à comprendre, vous allez vous démonter les boyaux de la tête. Quant à Maître Marcel, il était un peu fumasse, vu qu’au départ le Cri-cri avait cru malin de ne pas nous faire passer par Pompey, ce qui expliquerait qu’il nous ait attendu pour que dalle, comme de juste. M’enfin, il a fini par nous tomber sur le paletot, et il en était tout guilleret, ça faisait plaisir à voir.

Mézigue, j’ai jeté un oeil sur la cambrousse, j’espérais que ce serait une splendeur : il est vrai qu’elle était pleine de chouettes couleurs, mais ça manquait de lumière. Ce sera pour la prochaine fois, et comme vous en serez tous, au lieu de vous calfeutrer comme des croulants, vous la reverrez la lumière, bande de taupes !

Un peu de tenue ! (13 novembre)

Halte au massacre de la langue française ! Faisons taire l’odieux usurpateur qui s’était indûment emparé de cette chronique ! Finissons-en avec ce style relâché, argotique, effroyablement populaire qui vous a été infligé ! Un peu de tenue, que diable, redonnons à notre belle langue ses lettres de noblesse…

Les preux chevaliers de la bicyclette se sont pressés en foule au rendez-vous dominical. Ce n’est pas que les prévisions météorologiques fussent mirobolantes, de malséantes averses pouvaient même survenir, mais comme certains membres de la confrérie s’étaient abstenus lors des excursions précédentes par crainte de subir un désagrément par trop humide, ces derniers avaient choisi ce matin de donner la préférence à la voix de la passion sportive plutôt qu’à celle de la peureuse raison. Le risque qu’ils prirent n’était pas chimérique puisque sur le chemin du retour une averse assez drue les surprit. Ils en furent quittes pour un refroidissement passager qui ne devrait pas entraîner de funestes conséquences pour leur précieuse santé.

Ils furent donc nombreux à s’élancer sur les routes alors sèches de la campagne lorraine, dix-sept coursiers flamboyants aux tuniques multicolores, puis pas moins de vingt une fois rattrapée l’avant-garde de l’escouade, et même vingt-et-un quand le sieur Lhoner, victime d’une confusion initiale (il se raconte qu’il est coutumier du fait), en eut terminé avec son errance solitaire. La cohorte pédalante était donc de belle taille, l’humeur était joyeuse, l’entente régnait entre les vénérables anciens et les jeunes impétrants, les plus véloces réfrénant leurs ardeurs, les plus fragiles prenant abri derrière les plus énergiques. Une leçon d’harmonie et de cordialité. Il faudrait ajouter une leçon de tolérance, à en juger par la liberté concédée à chacun de contribuer, en fin de randonnée, à l’éparpillement général. Pour cette fringante communauté, la cohésion durable est un impératif et la dispersion finale une récompense.

Selon l’étrange et antique rituel qui est le leur, ce fut à proximité d’un vieux cimetière qu’ils se restaurèrent d’abondance : nul doute qu’ils témoignent ainsi de l’attachement qu’ils vouent à leur terroir et à ceux qui les y précédèrent, en même temps qu’ils se préparent avec philosophie à l’échéance que nul n’élude. Ces hommes tout en muscles ont aussi une âme. En un temps où bien des valeurs sont foulées au pied, c’est là le constat rassurant dont ils offrent l’inestimable exemple. Mon illustre confrère, le regretté Maurice Barrès, qui fut le héraut de la terre lorraine en même temps qu’un pionnier du vélocipède, eût trouvé en ces hommes de haute vertu le motif d’un profond réconfort.

Le chroniqueur ne peut que se réjouir chaque jour davantage d’appartenir à une telle confrérie : c’est pour lui rendre hommage qu’il s’est fait un devoir de l’évoquer en des termes qui fassent honneur à la langue française, le plus cher trésor de notre commun patrimoine.
Reynald
PS : l’AG approche, les élections aussi : ne manquent plus que vos candidatures.

Deux leçons (20 novembre)
Temps doux et ensoleillé. La menace du jour ce n’est pas la pluie, c’est le vent. Dès les premiers kilomètres, ils sont dans le vif du sujet, ceux qui se sont pas laissés impressionner par cette menace et qui ont enfourché leur machine (il y en aura en tout une quinzaine). Pour souffler, ça souffle ! Il va donc falloir compter avec le Grand Soufflant, le fameux mistral lorrain, qui risque bien d’éparpiller les pédaleurs, tant il sera difficile, et imprudent, de « rester dans les roues ».

Mais ce que le vent ne réussit pas à faire immédiatement, Maître Marcel s’en charge avec maestria. Sur les hauteurs de Ludres, une crevaison l’arrête : il se lance alors dans un mémorable atelier « réparation ». Une première fois, il répare, vite fait bien fait. Il remonte en selle, Marcel, et aussitôt s’arrête. C’est qu’il vient de crever derechef, le chef Marcel. Pas du genre à se dégonfler pour si peu, le voici qui de nouveau répare et regonfle, vite fait bien fait. A peine remis en selle, le voici qui remet ça, une troisième fois le voici à plat… C’est pourtant pas l’air qui manque alentour, mais, comme dit l’Evangile, « le vent souffle où il veut », et dans la chambre de Marcel il ne veut pas entrer, ou du moins pas rester. A chaque fois, il ne fait que passer. Bref, notre mécano de plein vent, abandonné des Dieux, doit jeter l’éponge. Il lui faudra monter dans la voiture-balai, avec la complaisance de Dame Monique, son épouse, venue secourir l’infortuné.

Un proverbe allemand dit : Einmal ist keinmal, une fois c’est aucune fois : c’est-à-dire qu’une fois ça ne compte pas, ça n’a pas de valeur, qu’il faut pouvoir revivre ce qu’on a vécu pour bien l’apprécier. Crever une fois, la belle affaire ; deux fois, c’est déjà mieux ; trois fois, ça devient vraiment sérieux. Merci maître Marcel, nous retiendrons la leçon.

Et pendant ce temps-là, me direz-vous ? C’est bien simple, comme le vent souffle très fort dans le dos quand on remonte la côte qu’on vient de descendre (et au sommet de laquelle Marcel bricole), une première fois on se fait un plaisir de la remonter, une deuxième fois on y prend goût, mais la troisième fois, il y a ceux qui se refont cette jouissive grimpette (ils sont sept) et ceux qui décident de prendre un peu d’avance (ils sont trois, puis quatre, une fois rattrapé l’homme des marchés de Noël – oui, il adore ça, Nono, les marchés qui portent son nom). Quant à Maître Pierre et Maître Gégé, c’est dès après la première descente de Ludres qu’ils avaient pris les devants. Jamais nous ne les revîmes. En revanche, c’est sur les hauteurs d’Azelot que tous les autres se regroupèrent. Et comme Marcel n’en était plus, tous ensemble ils demeurèrent. Ni nouvelle crevaison, ni coup de vent fatal.

Mais tout de même, on a bien cru parfois verser au fossé ou s’emplâtrer dans ce qui venait en face, tant les rafales latérales nous secouaient. Celles qui venaient pleine face, il fallait se les manger, mais elles étaient plus franches. Sur le plateau de Frolois, Franck a même préféré mettre pied à terre, et je lui donne raison, vu que je suis allé plusieurs fois rouler à l’anglaise, et qu’il y a un automobiliste au moins qui n’a pas aimé du tout, si j’en crois la façon qu’il a eu de me klaxonner dans les bronches. En revanche, le faux-plat descendant avec violent vent arrière entre Manoncourt et Saint-Nicolas, c’est plus vite qu’une descente de col qu’on l’a avalé (Gaby dit avoir atteint les 77 km/h, c’est vous dire). « Le vent électrique », qu’il a appelé ça, notre marchand de Noël. Le genre de vent qu’il ne faudrait avoir que dans le dos. Et pas seulement une fois, tant il est vrai que einmal ist keinmal : c’est la deuxième leçon du jour. Je sens que vous allez tous la préférer à la première.

Dimanche 27 novembre : Après l’AG la Grande Récré

Lendemain d’AG. L’AG des âgés (et de quelques autres). Lendemain de couscous. Le risque était grand ce matin de pédaler dans la semoule. Ou de rouler comme des saucisses. Avec des remontées de Ventoux, le vin de circonstance qui nous fut servi hier soir, un vin de soleil, un vin qui tape fort. Qui empêche de dormir (je ne serai pas le seul à en témoigner). Tant pis, on y va, on court le risque, pédaler est notre destin, pas de couscous bien arrosé qui tienne (très arrosé, faut dire ce qui est). Inch’Allah !

Au rendez-vous, un monde fou. Pas moins de 22 ou 23 Randos, un record cette année. Mais l’AG a toujours cet effet-là : ça ranime la flamme, ça resserre les rangs. Faudrait-il en faire une chaque mois ? En plus de nous autres, il y a là nos ostrogoths préférés, les athlètes de haut niveau qui carburent à la Champigneulles, les vieilles gloires qui font ce qu’elles peuvent pour se survivre. Faut dire que les Jacqou, les Jean-mi, les Clo-clo, les Cisco et consorts, ils nous ont piqué notre lieu de rendez-vous historique ! Alors, quand on y retourne, à la Porte Désilles, on les retrouve, les bandits. Nous, bons princes, on les laisse monter dans le wagon (en première), et roule ma poule, nous voici pas loin de quarante sur la route. Applaudissements nourris.

Si ce n’est la Lisbeth qu’on ne présente plus, pas de dames : aucune, par exemple, de celles dont on a appris qu’elles sont désormais équipées de vélos à assistance électrique. Je vous le demande, mes très chères : vous attendez quoi ? Les bienvenues vous êtes, en douter serait nous offenser ! Grâce à vos petits moteurs, vous pourriez même nous abriter. On prendrait votre roue… non, rien de plus, nous savons nous tenir. De vrais gentlemen. Enfin, pas tous… Mais vous les repérerez facilement (ils ont la bave aux lèvres et la pédalée sournoise).  Et comme à l’AG d’hier, on se demandait comment créer d’autres sections au sein du club, vous apporteriez la première réponse.

Ce qui fait qu’une idée m’est venue (ça arrive à tout le monde) : si chacun des membres du club relevait le défi de recruter au cours de l’année 2017 deux nouveaux (ou deux nouvelles), nous aurions à terme la réponse. Nous pourrions créer l’année suivante plusieurs groupes de niveaux, ou d’affinités (soyons souples), pour nos sorties dominicales (et les autres). Chiche ? Deux chacun, ce n’est pas la mer à boire. En misant sur la diversité dans le recrutement. Je sais… il ne suffit pas de le dire. Mais on peut rêver, non ?

Va-t-il finir par dire un mot de la sortie du jour, cet incorrigible bavard ? Tout doux, j’y viens. Je résume : beau temps, grand soleil, verts pâturages et rivières scintillantes, vaches pensives et moutons rêveurs. Gros peloton qui fait l’accordéon, regroupement général lors de la pause de Blénod, puis séparation en deux groupes. Vent favorable pour rentrer, franche partie de manivelles à l’avant (j’en témoigne), grosse flânerie à l’arrière (j’imagine).

Et fantaisies diverses : extra-systoles (Jacquou le hâbleur), méga-giclettes (Gaby GPS), mini-relais (plein de gros feignants), maxi-frime (les flingueurs de pancartes), demi-soldes (qu’est-ce qu’il veut dire ?), super-plaques (le Marcel-qui-s’éclate, le Toubib qui décoiffe), nano-rythme et micro-vitesse (l’arrière-garde), et pour tous un méga-plaisir… Pourvu que ça dure !

Quant à moi, c’était ma première sortie d’ex-secrétaire du club, de double retraité, en somme (qu’il m’a dit, le chti Jicé). Sans emploi. A moins que la mouche VVV (celle qui vous file le Violent Virus du Vélo) ne vienne me piquer. Gare ! Faudra que j’en parle à Gégé, il en connaît un rayon sur la question, lui qui a commencé de s’en guérir (qu’il prétend), de ce virus très contagieux. Et tellement jouissif dans ses conséquences, faut bien l’avouer.

Quelques réponses (11 décembre) :

Les roupilleurs se posent des questions. Il convient donc de leur apporter des réponses.

1) Quel temps fit-il ce matin ? Un bon temps pour rouler : plutôt doux, sans vent, sans pluie. On a certes roulé dans l’humidité, mais pas sous les eaux : les nuages avaient vidé leur sac pendant la nuit, il ne restait rien à déverser ; on a eu de la brume, mais aussi du soleil.

2) Combien pour en profiter ? Onze Randos au départ plus un Ostrogoth de nos amis, un Francis esseulé, abandonné par sa moitié, le toubib se faisant porter pâle (un comble). Ce sont choses qui arrivent dans tous les couples… te bile pas, Francis, tu le reverras ton Jean-Mimi. Moi, c’est le Patou qui m’a fait faux bond, le faux frère. Gégé ayant tôt terminé sa visite de courtoisie, et Francis étant pressé de rentrer (un brin chagriné, tout de même), c’est à dix que l’essentiel du parcours fut effectué.

3) Qui s’est offert ce bon bol d’air ? Les deux Guillaume (qui vont devenir officiellement membres du club – depuis le temps qu’ils roulaient à nos crochets, c’est bien le moins) ; et les uniques Christophe, Stéphane, Marc, Amico, Alain (autre néo-Rando), Gaby, Jean-Marie B., et moi-même. La crème de la crème, c’est vrai, nous sommes d’accord.

4) Et le tempo, quel fut-il ? Excellent, ni trop lent ni trop élevé, un bon petit tempo d’hiver, juste de quoi entretenir nos précieux organismes, et de quoi pédaler à l’unisson. L’hiver a ses bons côtés. On ne se déglingue pas la carcasse. On a le temps de causer, et on ne s’en prive pas.

5) Des incidents ? Aucun, ni glissade ni crevaison ; et pas non plus de conducteur cinglé, ni d’animaux sauvages nous coupant la route, ni de chasseurs nous prenant pour des lapins. On en a aperçu un, de chasseur, il avait une veste multicolore si voyante qu’il devait faire fuir de très loin le gibier ; et à en juger par sa trogne de poivrot, sûr que son haleine ne devait pas non plus les attirer, les sobres bêtes. J’ajoute qu’à Domèvre-en-Haye, il n’y avait pas foule dans les rues, pas un seul couillon qui se serait trompé de date, puisque ce n’était pas le jour de la très fameuse « foire aux roubignolles ».

Je réponds maintenant à la question que personne ne m’a posée : qui ai-je rencontré sur la route lors de ma petite balade solitaire de vendredi ? Un jeune cycliste qui m’a d’abord doublé, puis attendu, au motif que ce serait plus sympa de faire route ensemble. Et de bavarder. J’ai donc appris que ce petit jeune appartenait à une famille de champions, étant le neveu de Pascal et Jean-Michel Lance, et le fils de Patrick. Lui-même fait de la compétition (avec succès), il vient t’intégrer le team Macadam cowboy. Sans pour autant songer à une carrière pro. Mais ce qui m’a touché, outre que le garçon est affable et courtois, c’est qu’il mène parallèlement des études de philosophie (il est en Master 2e année), à Nancy, sur le campus où j’ai poursuivi jadis les mêmes études (avant de me convertir aux Lettres) … il y a de cela un demi-siècle. Étrange rencontre, par-delà les années. J’aurais pu le prendre pour une sorte de double, un autre moi-même, s’il n’y avait pas entre nous une petite différence : lui, dans le cadre de sa préparation hivernale, il est allé grimper le raidard de Villey-le-Sec sur le grand plateau !

Solstice (Noël 2016) :

Beaucoup de réveillonneurs, peu de réveillés : six nous étions, pour accomplir le pèlerinage de Noël, frère Marcel et frère Christian, le chanoine Gabriel, le père Stéphane, le révérend Pierre et le scribe. Le pèlerin de Compostelle, Noël de son prénom, manquait à l’appel : une honte. Ce que nous avons fait ? Nous avons roulé et prié pour vous (qui confondez fête de la Nativité et grosse bouffe, autre sujet de honte).

Ce saint dimanche était aussi le dernier dimanche de l’année, et le premier après le solstice. On est entré dans l’hiver, les jours rallongent, on va vers la lumière. C’est pourquoi bien des fêtes antiques, et donc païennes, se déroulaient en cette période : Saturnales, culte de Mithra, culte du Soleil (Sol invictus)… et plus tardivement le Noël chrétien, la date du 25 n’ayant été retenue qu’au IVème siècle pour fixer la naissance de Jésus. C’est donc le passage du solstice, le retour du soleil et de la lumière qui dans tous les cas était l’événement décisif. Et qui le demeure. Ce matin, malgré les nuages, nous avons eu notre moment de soleil.

Dimanche prochain on aura basculé dans l’année nouvelle. L’an 2017, après Jésus-Christ. Pour mémoire, c’est seulement au VIème siècle, que le moine Denys a inventé cet étrange calendrier fondé sur un calcul approximatif de l’année de naissance du Christ. On s’est donc mis, dans l’Occident christianisé, à redater toute chose après coup, l’avant et l’après JC. En réalité, on s’est aperçu un jour que le bon moine s’était trompé de 6 ou 7 ans dans ses calculs : trop tard, son calendrier s’était imposé quasi universellement.
Dès le siècle suivant, la nouvelle religion instaurée par Mahomet allait à son tour se donner un calendrier, la date-pivot étant celle de l’Hégire (l’exil à Médine des premiers disciples et de leur prophète), date qui correspond pour nous à l’an 622 – et qui a été elle aussi fixée après coup, par le calife Omar. Comme de leur côté, les Juifs continuent de se référer à une date bien plus ancienne, mais elle aussi fixée tardivement (au IVème siècle de notre ère), on peut tirer de toute cette affaire une grande leçon de relativité.

L’an prochain nous serons donc en 2017, mais aussi en 1438 et en 5777. Il suffit de s’entendre, mes amis, mes frères, mes sœurs, quel que soit le nom qu’on invoque : Dieu, Allah, Yahvé… Ou le Soleil (dont le point commun avec le vélo n’échappe à personne : les rayons font leur force). Fêtez et festoyez en paix !
Reynald
PS 1 : dimanche prochain, il y aura surabondance de réveillonneurs, avinés et empâtés, et pénurie de réveillés. Moi, je me ferais bien une petite sortie de récupération dans l’après-midi. Si la météo est favorable, si le cœur  vous en dit, et l’estomac, rendez-vous à 13h30 Porte Désilles.
PS 2 : Francis a pu rentrer chez lui, il peut alterner lit médicalisé, déambulateur, fauteuil roulant et béquilles… tout le monde ne peut pas en dire autant. Son moral est bon, même si son bassin le bassine.