• Premier avril

Dimanche de Pâques, 1er avril :

Le rapprochement est troublant : fêter Pâques un premier avril, est-ce bien judicieux ? Coller un poisson d’avril sur la tunique du Ressuscité, est-ce bien catholique ? Il est vrai que le poisson fut l’un des symboles de ralliement des premiers chrétiens, au temps de la persécution romaine. Mais celle-ci fut tout le contraire d’une blague.
Les Randos qui sortirent ce jour furent, quant à eux, persécutés par le mauvais temps, au point d’évoluer sous l’eau un peu à la manière de nos frères poissons : fluides, calmes, sereins, imperméables à l’aquatique atmosphère. Du moins les huit amphibiens du rendez-vous, qui ne furent bientôt plus que quatre. Gégé nous a bénis et s’en est retourné, Marco était attendu pour un repas pascal, Stéphane manquait de jus, et le Patou pataugeait par trop. Ne trouvant pas la blague si mauvaise, les quatre autres pèlerins sous la pluie lustrale prolongèrent leur effort :  Jean-Michel présidait, Pierre vérifiait son parcours, le secrétaire prenait des notes, et le jeune Guillaume (Losfeld) couinait. Plus exactement, c’est son étrange biclou qui n’a cessé de couiner, un engin baroque fait de bric et de broc, avec des pièces probablement achetées sur le Bon Coin.
La pluie cessant, ces quatre heureux apôtres firent donc le parcours complet (96 km pour moi), une manière de condenser en une seule matinée le chemin de croix, la descente au tombeau et la résurrection. J’exagère à peine, avec le vent favorable du retour, nous nous sommes sentis revivre. Au point de supporter dans les derniers hectomètres une pluie cinglante qui ressemblait à de la grêle. Nous en fûmes quittes pour rouler enfin sur des oeufs : en ce jour de Pâques, on ne pouvait faire moins.
Faisons le point : a-t-on déjà connu pareil début d’année ? La réponse est non. Ce début calamiteux, quand va-t-il prendre fin ? La réponse est incertaine. On dit que les plaisanteries les meilleures sont les plus courtes, et celle que la météo nous refourgue de jour en jour devient lassante. Qu’est-ce qu’on a fait au Bon Dieu pour être traités de la sorte ? De Noël à Pâques, le martyre fut bien long, et quand je pense que l’Ascension, c’est seulement dans quarante jours… Mon Dieu, envoyez-nous un signe de votre sainte clémence, et plus jamais, je le promets, je ne blasphèmerais.
À ces mots, frères pédaleurs, vous mesurerez l’étendue de mon dévouement : ma prière sent le soufre, mais j’aimerais tellement qu’on puisse enfin refaire tous ensemble une sortie digne de ce nom.
Toutefois, quel que soit le temps, je m’abstiendrai demain, pour me reposer avant la sortie VVV prévue mardi (si le ciel, ou le Ciel, le permet).
Reynald